
Titre original: | Jappeloup |
Réalisateur: | Christian Duguay |
Sortie: | Cinéma |
Durée: | 130 minutes |
Date: | 13 mars 2013 |
Note: | |
Au milieu des années 1970, Pierre Durand est un jeune cavalier prometteur, qui espère un jour faire carrière dans la discipline du saut d’obstacle. Mais les distractions de la vie d’étudiant pour devenir avocat et quelques échecs et accidents mineurs l’éloignent de sa passion, qu’il partageait depuis son enfance avec son père Serge. Deux ans après avoir arrêté, Pierre reprend pourtant l’entraînement, pour faire plaisir à sa famille et à son amie Nadia, mais surtout pour mener son cheval Jappeloup à quelques unes des plus belles victoires de l’équitation française. Mais le chemin vers la consécration est semé d’embûches.
Critique de Tootpadu
Nous avions perdu de vue Christian Duguay, ce réalisateur canadien qui, après des débuts prometteurs (Planète hurlante), avait rapidement sombré dans des produits sans âme (L’Art de la guerre). Il nous revient après une longue absence des plateaux de cinéma, qu’il avait désertés pour s’exercer dans des mini-séries et autres téléfilms qui lui ont apporté un certain prestige. Du coup, ce conte hautement édifiant s’apparente souvent à un téléfilm amélioré, trop empressé de servir les clichés d’un roman de gare pour prendre des libertés formelles ou narratives par rapport à la formule de la gloire sportive, remportée au bout de maintes épreuves. Ce n’est en effet pas par hasard que le scénariste et acteur Guillaume Canet cite Rocky de John G. Avildsen comme référence, tant ce film français est la copie conforme de la recette à succès qui fait encore rêver les perdants d’Amérique et d’ailleurs.
Le parcours de Pierre Durand et son cheval Jappeloup a beau être inspiré de faits réels, son agencement filmique répond sans broncher au fil directeur d’un optimisme démesuré, sûr de la victoire en dépit d’innombrables revers. Et c’est au moins cette alternance trop régulière entre les hauts et les bas de la carrière du cavalier qui nous réserve un minimum d’entrain dramatique. Sauf que la nature même du sport évoqué, bâti sur la schizophrénie de l’observateur qui espère un sans faute, tout en recherchant l’appréhension viscérale de la chute, nous épuise au fur et à mesure des compétitions quittées soit en vainqueur, soit humilié jusqu’à l’os. En employant à l’excès des dispositifs lourds comme le ralenti, la mise en scène enfonce Jappeloup dans le domaine peu délicat des poncifs à rallonge. Ce manque de légèreté narrative l’empêche de respirer et de gagner en autonomie par rapport au ton tendancieux que la musique écrasante de Clinton Shorter lui inflige.
Au moins l’implication de Guillaume Canet, aussi risible en tant qu’étudiant adolescent que crédible comme sportif de haut niveau dans une discipline dans laquelle il s’était distingué avant de devenir acteur, permet de sauver les meubles dans ce film très conventionnel. La longue suite des épreuves que son personnage doit traverser – y compris les dilemmes entre sa vie professionnelle et privée et les doutes quant à la direction que son existence devra prendre – fonctionne en tant que calvaire contraignant, au bout duquel nous vivons la réussite finale comme une délivrance. Une délivrance de quoi ? De la crainte de devoir subir un énième coup dur du destin qui prolongerait le supplice du héros ? Ou bien est-ce le soulagement de voir enfin arriver à bon port une trame en dents de scie, qui n’a à aucun moment su quitter le terrain sûr du mélodrame consensuel ?
Vu le 5 mars 2013, à la Salle Pathé Lamennais
Note de Tootpadu:
Critique de Mulder
Jappeloup est un film phénomène pour de multiples raisons et il a divisé une nouvelle fois notre rédaction. Ecrire une critique d’un film peut se faire sitôt le film vu, voire avec un certain recul, afin d’en parler librement sans contrainte réelle. Rares sont les films français qui nous touchent aussi personnellement et qui nous donnent envie d’en connaître plus sur le monde de l’équitation. Dans ce sens, on comprend tout à fait Guillaume Canet (acteur principal, dialoguiste, adaptateur et scénariste du film), ancien écuyer équestre émérite et compétiteur de haut niveau, il avait arrêté longtemps avant ce film de monter à cheval et suite à celui-ci a décidé de reprendre la compétition …
Ce n’est pas non plus un hasard si cet acteur a écrit ce film inspiré d’une histoire vraie en ayant en tête le film Rocky, scénarisé par Sylvester Stallone, et nommé aux Oscar en 1977. Comme ce boxeur, le personnage de Pierre Durand montré dans ce film a toujours dû se battre contre lui-même ; son entraîneur pour accéder à la plus haute distinction : une médaille d’or aux jeux olympiques (Séoul,1988). C’est notamment grâce à l’appui de son père qui a toujours été présent et suivi de très près sa carrière jusqu’à sa mort que ce grand cavalier et son fidèle destrier ont pu se faire un nom dans le monde hippique. Le film s’inspire donc de la réalité pour en tirer une histoire universelle sur le dépassement de soi et sur le fait de se battre pour réussir.
Hormis la présence de Guillaume Canet, Daniel Auteuil et Marina Hands dans les rôles principaux, rien ne pouvait pourtant nous préparer à une telle réussite avec un réalisateur canadien guère habitué à nous proposer des films d’une telle efficacité. A part quelques petites productions guère attrayantes (Scanners 2 et 3, L'Art de la guerre) et des séries pour la télévision, rien ne pouvait réellement laisser présager un résultat aussi parfait, tant au niveau de la direction des acteurs (excellent trio d’acteurs principaux) que de la maîtrise du sens du spectacle.
Le film nous présente donc les rapports entre un écuyer de talent, ses parents, son entraîneur et la femme de sa vie et bien entendu son fidèle destrier. Ce cheval jugé trop petit réussira pourtant à se faire dompter et à relever des défis impossibles.
Jappeloup est donc à ce jour l’un de mes films français préférés, une très belle histoire d’amitié entre un cheval et un homme et surtout une belle romance. La qualité du résultat tient ainsi beaucoup à Guillaume Canet qui s’est investi totalement dans l’élaboration de ce film. Le succès de ce film est amplement mérité et une grande part de cette réussite lui impute.
Vu le 18 mars 2013 au Gaumont Disney Village, Salle 01, en VF
Note de Mulder: