Une nouvelle chance

Une nouvelle chance
Titre original:Une nouvelle chance
Réalisateur:Robert Lorenz
Sortie:Cinéma
Durée:111 minutes
Date:21 novembre 2012
Note:
Gus Lobel est le sélectionneur vieillissant de l’équipe de base-ball Atlanta Braves. Son contrat arrive à échéance dans trois mois. Pour éviter d’être mis à l’écart, il tait à son entourage qu’il perd progressivement la vue. Sa dernière chance pour prouver qu’il a toujours ce qu’il faut est d’évaluer correctement Bo Gentry, un jeune joueur que les équipes s’arracheront à prix d’or lors de son passage chez les pros à la prochaine saison. Il part seul en Caroline du Nord, afin d’y observer ses derniers matchs. Sa fille Mickey, une avocate ambitieuse qui est sur le point d’être promue au poste d’associée de son cabinet, le suit, à la fois pour l’assister et pour enfin saisir l’occasion de réellement parler avec ce père, qui l’avait repoussée dès l’adolescence et la mort prématurée de sa mère.

Critique de Tootpadu

Clint Eastwood grommelle beaucoup et Justin Timberlake confirme qu’il est incapable de jouer plus qu’un seul et unique personnage, à savoir lui-même. Entre ces deux interprétations guère passionnantes, Amy Adams s’en sort à peu près avec les honneurs. La même chose n’est hélas pas vrai pour la mise en scène transparente de Robert Lorenz, un ancien sous-fifre de l’écurie Eastwood, qui a repris l’essentiel de l’équipe du maître, sans pour autant reproduire l’efficacité et l’intensité sobre de ses meilleurs films. Profondément vieillot et superficiel, Une nouvelle chance s’inscrit davantage dans la tradition de ces drames bienveillants, qui célèbrent coûte que coûte les valeurs américaines les plus élémentaires.
A commencer par le scénario ennuyeux, car hautement prévisible, qui exacerbe le genre de manichéisme qu’on pensait passé de mode avec la fin de la Guerre froide. Entre les bons, fidèles aux méthodes pérennes qui voient dans le sport autre chose qu’une formule de succès à calculer par ordinateur, et les méchants, ces truands lâches et mercantiles qui ont tout oublié de l’âme de cette discipline fédératrice de l’Amérique profonde, le récit n’aménage aucun espace de réflexion sur les véritables enjeux de ce divertissement traditionnel qui attire les foules et brasse les millions de dollars. L’antagonisme entre le camp de Gus et celui de la nouvelle garde, sans scrupules et sans savoir-vivre non plus, repose sur des enfantillages et des revirements poussifs, au lieu d’examiner le contrat des générations en panne depuis un point de vue adulte et révélateur des vrais problèmes de la société américaine d’aujourd’hui. Même le côté divertissement d’évasion du film ne fonctionne pas sans accroc, notamment à cause d’une intrigue si gentillette, inoffensive et médiocre, qu’elle provoque chez nous de l’ennui, en lieu et place de la nostalgie qu’elle aurait dû susciter.
En tant que chant de cygne digne et mélancolique, ce premier film dans lequel Clint Eastwood ne fait que jouer depuis dix-neuf ans ne fait guère le poids. Tiraillé entre les passages obligés du drame sportif et celui qui s’apitoie sur les inconvénients de la vieillesse, il tente en vain de faire perdurer l’aura d’un acteur de légende, dont l’impact est assez dérisoire ici, peu importe que ce soit devant la caméra ou derrière, où sa succession nous paraît loin d’être réglée.

Vu le 15 novembre 2012, à la Salle Warner, en VO

Note de Tootpadu:

Critique de Mulder

Cela faisait quatre ans que Clint Eastwood n’avait joué un rôle principal, soit depuis le très réussi Gran Torino. Certes, il était apparu brièvement dans trois documentaires (Addicted to fame, Kurosawa la voie et Hollywood et les indiens), mais sa casquette principale est actuellement celle de réalisateur, avec en moyenne un film tous les deux ans, voire tous les ans. Cette fois-ci, c’est son producteur principal depuis 2002 qui passe derrière la caméra et Clint Eastwood ne fait que jouer et produire.

L’histoire contée est assez simpliste et s’attache à suivre un découvreur de talents spécialisé dans le base-ball, qui voit sa vie mouvementer avec la perte progressive de sa vue. Il décide de faire un dernier voyage à Atlanta et y sera rejoint par sa fille. A Atlanta, il passe ainsi son temps à observer un joueur, qui pourrait être prometteur et retrouve une de ses anciennes connaissances.

Le film est dans la mouvance du film Le Stratège de Bennett Miller, mais en étant moins cérébral et plus enclin aux sentiments et à une ode à la famille recomposée. Certains ne pourraient voir dans ce film qu’un simple petit film guère réfléchi, véhicule à star en quête de reconnaissance ou d’un plus grand public, tel Justin Timberlake et Amy Adams. Mais cela reviendrait à sous-estimer la force de ce film qui se laisse suivre sans aucun temps mort et nous renvoie à nos blessures du passé, qui font de nous ce que nous sommes actuellement. Les trois sports les plus suivis aux Etats-Unis sont bien sûr le football américain, le basket et le base-ball. Ces trois sports sont souvent suivis en famille dans un stade, où le coca cola et les hot dogs règnent en maîtres incontestés d’une sous-culture sportive.

Clint Eastwood continue à interpréter toujours le même rôle, celui d’un dur à cuir solitaire et reclus. Avec l’âge, il est loin le temps où il incarnait le héros solitaire intraitable, faisant respecter la loi. Ce film renvoie ainsi à cet acteur qui était l’un des meilleurs et qui avec l’âge se dit qu’il est temps pour lui de laisser la main, voire de prendre du recul par rapport à son métier. Son rôle est ainsi une nouvelle fois parfaitement maîtrisé, car près de sa véritable nature. Les rapports qu’il entretient avec sa fille unique font de ce film un film attachant et mémorable. Amy Adams y est une nouvelle fois parfaite et loin des films très familiaux, voire enfantins (Il était une fois, La Nuit au musée 2) semble maintenant plus attachée à des rôles plus mûrs et réfléchis. Quant à Justin Timberlake, il confirme de film en film tout le bien que l’on pense de son travail.

Robert Lorenz réalise avec son premier film un film qu’il n’aura pas à renier plus tard dans sa carrière, mais qui ne s’imposera pas comme une réussite indéniable. Il s’agit juste d’un film du niveau d’une commande de studio bien emballée, bien présentée, mais qui ne trônera en aucun cas dans des cinémathèques comme objet d’étude pour de jeunes réalisateurs. Ce film aurait gagné à être réalisé par Clint Eastwood, car il y aurait apporté sa sensibilité, son style si intime et parfait et surtout sa passion véritable d’homme de cinéma.

Ce film ne restera pas comme le plus abouti des films avec Clint Eastwood, mais se laisse regarder et apprécier tel une bonne bouteille de whisky un soir de fête, au coin de la cheminée.

Vu le 15 novembre 2012, à la Salle Warner, en VO

Note de Mulder: