Impossible (The)

Impossible (The)
Titre original:Impossible (The)
Réalisateur:Juan Antonio Bayona
Sortie:Cinéma
Durée:114 minutes
Date:21 novembre 2012
Note:
En décembre 2004, Maria et Henry s’envolent avec leurs trois fils vers un hôtel situé sur la côte paradisiaque de la Thaïlande, pour y passer ensemble les fêtes de fin d’année. Tout se passe parfaitement bien, jusqu’à ce qu’un immense tsunami ravage la région au matin du 26 décembre. Prise dans les flots, Maria arrive à s’en sortir de justesse et de retrouver son fils aîné Lucas. Grièvement blessée, elle cherche à se mettre à l’abri avec lui, tout en ignorant ce que sont devenus son mari et ses deux autres enfants.

Critique de Tootpadu

L’horreur à l’état pur que les événements tragiques de Noël 2004 nous avaient inspirée à l’époque est parfaitement ravivée par ce film, qui s’inspire de l’histoire vraie d’une famille espagnole prise dans le chaos de cette catastrophe sans précédent. Sauf qu’au lieu de sympathiser de loin, depuis le confort du salon familial décoré aux couleurs de la saison, nous sommes propulsés sans ménagement dans la lutte acharnée pour la survie que doivent livrer les personnages de The Impossible. Rien que la première vague, avec sa force brute de destruction, la sensation d’une désorientation complète et la résignation cruelle à une mort certaine, provoquent adroitement le genre de peur primaire que l’on préfère généralement oublier dans le contexte préservé de la civilisation citadine. Et ce qui suit n’est guère plus rassurant, puisqu’au cataclysme suit une longue période d’errance, d’épuisement et de solitude au cœur d’un décor dévasté.
Autant écrire que le deuxième film du réalisateur Juan Antonio Bayona s’acquitte plus que convenablement du point crucial de chaque film catastrophe qui se respecte. Hélas, le traitement des conséquences de ce coup de poing traumatisant est déjà plus calamiteux, surtout parce que la narration y a constamment recours à une manipulation flagrante des sentiments. Les larmes coulent donc régulièrement, mais au moins chez nous, cette effusion de compassion nous a laissé l’arrière-goût amer d’y avoir succombé à cause d’une surcharge d’effets larmoyants et non pas parce que la façon de conter cette histoire nous aurait sincèrement émus. En effet, la mise en scène ne lésine pas sur les moyens pour nous arracher cette petite larme, à coups de musique sirupeuse, de subterfuges de montage point subtils, et d’un ton qui rend le sort de cette famille trivial d’une façon outrancière, au lieu de lui conférer une dignité humaine plus authentique.
On sort donc comme lessivé de ce film, mais néanmoins un peu déçu de s’être fait avoir par une trame narrative, qui est en fin de compte assez pauvre en enjeux véritables. Dès que la question de la survie passe à l’arrière-plan, au profit de retrouvailles hautement improbables dans le désordre ambiant, ce sont les dispositifs les plus voyants du vocabulaire cinématographique qui prennent la relève, pour mieux nous manipuler, mais aussi pour atténuer au fur et à mesure – et pas forcément de façon volontaire – l’effet de choc que nous avait inspiré le désastre initial.

Vu le 13 novembre 2012, au Gaumont Marignan, Salle 3, en VO

Note de Tootpadu:

Critique de Mulder

Cinq années après avoir marqué nos mémoires par un conte fantastique réussi (L'Orphelinat), Juan Antonio Bayona signe son second film dans un registre différent en adaptant une histoire vraie. Celle-ci raconte l’histoire vraie d’une famille prise dans une des plus grandes catastrophes naturelles asiatiques et qui a été séparée suite au tsunami du 26 décembre 2004. Séparés, ils vont devoir survivre à tout prix et tout tenter pour se retrouver.

Comme vous pouvez le voir, ce film a divisé notre rédaction. Son interprétation critique dépend du point de vue et du ressenti à la vision d’un tel drame. Loin d’utiliser des effets de style inutiles et surtout de réaliser tel un documentaire, caméra à l’épaule, ce film nous accapare dès la première minute et tel un grand huit nous fait passer de la tristesse à la rage de vivre d’une scène à l’autre. Filmer une catastrophe naturelle et savoir maintenir l’intérêt du spectateur durant pratiquement deux petites heures n’est pas chose facile. Le réalisateur, après avoir présenté sommairement cette famille anglaise (l’histoire vraie concerne une famille espagnole), composée d’un cadre supérieur Henry (excellent Ewan McGregor, une fois de plus) et sa femme médecin, Maria, femme au foyer pour élever leurs enfants (sublime Naomi Watts) et de leurs trois enfants, nous montre ce tsunami destructeur et dont les images continuent encore à hanter notre subconscient. Le réalisateur est un humaniste et à fleur de peau nous livre un drame poignant où le mot "survivre" prend toute sa grandeur. En effet, dans un monde rendu apocalyptique montré à bon escient dans ce film, nous allons suivre dans un premier temps le parcours de Maria et de Lucas, le fils aîné, avant de suivre celui de Henry et des deux cadets Simon et Thomas. Cette construction en parallèle renforce le climat de terreur véritable, engendrée par cette terre hostile. Surtout, il montre une Thaïlande dévastée par un fléau naturel et un peuple chaleureux, capable d’aider son prochain. Nous sommes donc loin de cette mentalité française, où chacun ne se soucie que de ses propres intérêts. Cette vision de l’humanité renvoie ainsi à la vision du peuple américain, capable de s’entraider et à ne faire qu’un pour affronter, comme ce fut le cas récemment à New York, les suites d’un ouragan terrible.

La réussite d’un tel film repose sur un scénario solide. Sergio G. Sánchez continue donc à signer celui-ci comme ce fut le cas pour le film précédent de Juan Antonio Bayona. Ce lien fort entre un scénariste et son réalisateur renforce le côté universel et humain de cette œuvre. Certes, le fait d’avoir recouru à des acteurs anglais et non espagnols témoigne d’une volonté de faire de ce film un « blockbuster espagnol » tout en surfant sur le mode des films dont Titanic est le fer de lance.

Reste que ce film est un film à découvrir d’urgence et mérite d’être sélectionné pour les prochains Oscars. Non seulement le public espagnol ne s’est pas trompé en lui offrant un accueil triomphal, mais surtout la critique espagnole encense ce film judicieusement, même si à le regarder de plus près, il se rattache plus au cinéma britannique (choix de la langue du film, du casting principal) que hispanique. Rarement aussi un film ne m’avait autant affecté et ému, surtout par la présence de Naomi Watts, qui irradie chaque minute de ce film. On notera enfin la découverte d’un jeune acteur dont on devrait entendre de nouveau parler. Tom Holland (non pas le réalisateur de Vampires vous avez dit vampires) fait des débuts très remarqués et se permet quelques répliques fortes auprès de Naomi Watts.

Enfin, certains pourront remarquer que ce film pousse un peu trop les effets de la corde sensible, voire utilise l’émotion du spectateur de façon très manipulatrice, voire exploite un fait divers marquant et que ceux qui l’ont vécu ne pourront jamais oublier, mais c’est le propre du vrai cinéma de nous divertir, de nous faire ressentir des choses et de garder un message clair, précis et véritable. C’est en cela que ce film est une des réussites de l’année 2012. Nous attendons donc avec grande impatience le prochain film de Juan Antonio Bayona.

Vu le 13 novembre 2012, au Gaumont Marignan, Salle 3, en VO

Note de Mulder: