Sessions (The)

Sessions (The)
Titre original:Sessions (The)
Réalisateur:Ben Lewin
Sortie:Cinéma
Durée:95 minutes
Date:06 mars 2013
Note:
Confiné dans un poumon d’acier depuis l’âge de six ans et une infection de polio, le poète Mark O’Brien peut s’imaginer seulement les rapports sexuels. Après avoir changé plusieurs fois d’aide-soignante et être tombé amoureux de l’une d’entre elles, Mark profite d’une série d’articles qu’il doit écrire sur le sexe chez les handicapés pour faire appel à une assistante sexuelle. Après avoir obtenu la bénédiction de son prêtre, le père Brendan, le trentenaire cherche à perdre sa virginité grâce à six sessions d’éveil érotique avec Cheryl.

Critique de Tootpadu

[…] La sexualité, ce grand sujet tabou que l’on contourne pudiquement au cinéma, à moins de l’y exploiter vulgairement, elle devient carrément gênante lorsqu’elle implique des personnes qui sortent de la norme. Alors que les films qui célèbrent sans complexe le rapport sexuel sous toutes ses formes, ou presque, sont extrêmement rares, ceux qui l’évoquent dans le cadre du handicap sont purement inexistants. En tant qu’obstacle à franchir pour atteindre l’idéal d’une normalité toute relative – et afin d’émouvoir en passant un public enclin au chantage sentimental – , le handicap a bon dos. Mais lorsqu’il s’agit de procéder à une banalisation de ce style de vie subi avec plus ou moins de sérénité, il n’y a plus personne.
La plus grande qualité de cette comédie dramatique est par conséquent de ne pratiquement jamais – à l’exception notable de l’épilogue – s’apitoyer sur le sort de son protagoniste, un homme à l’esprit vif et au corps inerte, qui rêve d’un dépucelage tardif avant que sa maladie n’ait raison de lui. Pour y parvenir, The Sessions n’emprunte point la même route qu’une pléthore de comédies pubères, qui accablent habituellement ce rite de passage important avec toutes sortes de vannes immatures. Peut-être à cause de l’âge plus très jeune des participants, l’apprentissage d’une sexualité épanouie y passe davantage par une mécanique pragmatique, in extremis déraillée par l’apparition inévitable des sentiments.
Le scénario de Ben Lewin, clairement plus astucieux que sa mise en scène conventionnelle, fait tout son possible pour minimiser l’importance du premier orgasme partagé, auquel Mark aspire pourtant avec tout son être. Il en résulte un ton détendu et sympathique, dont l’érotisme est en revanche quasiment absent. La symbiose des corps et leur nudité, bien plus assumée chez la femme que chez l’homme, relève ainsi davantage d’une approche naturiste, et plus précisément du bien-être dans son propre corps, peu importe ses imperfections.
Cet échange entre Mark et Cheryl, interprétés sans affectation par John Hawkes et Helen Hunt, fonctionne même si bien, que l’action parallèle autour du prêtre s’avère quelque peu redondante. Bien que le besoin d’obtenir une validation soi-disant spirituelle de sa démarche sexuelle dévoile les peurs et les doutes de cet homme sans autre défense que sa parole et la pitié des autres, il doit exister une façon plus adroite de l’inclure dans une narration autrement sans accroc notable.
Enfin deux petits détails amusants : d’abord, les retrouvailles entre John Hawkes et Rusty Schwimmer, douze ans après En pleine tempête de Wolfgang Petersen sont à l’opposé de leur histoire d’amour hésitante d’alors, et puis, la vie de Mark O’Brien a déjà fait l’objet d’un court-métrage documentaire, Breathing lessons The Life and Work of Mark O’Brien pour lequel Jessica Yu avait reçu un Oscar, qu’elle avait accepté avec sa remarque mémorable que sa robe aurait coûté plus chère que son film. La boucle est donc bouclée, puisque la sortie française du film, initialement prévue pour le mois de janvier, avait été repoussée jusqu’en mars, après la cérémonie des Oscars, où ce film sobre et plaisant devrait concourir d’une façon ou d’une autre.

Vu le 11 octobre 2012, au Club de l'Etoile, en VO

Note de Tootpadu: