
Titre original: | Tempête à Washington |
Réalisateur: | Otto Preminger |
Sortie: | Cinéma |
Durée: | 138 minutes |
Date: | 04 octobre 1962 |
Note: | |
Le président américain a désigné Robert Leffingwell pour le poste vacant de secrétaire d’état. Ce choix controversé doit être validé par le sénat. Puisque le vieux sénateur Seab Cooley compte s’opposer par tous les moyens à cette nomination, la charge de décision est confiée à une commission d’enquête, présidée par le jeune sénateur Brigh Anderson. En dépit des attaques vicieuses de Cooley, admis comme simple observateur, Leffingwell fait bonne figure lors des auditions. Jusqu’à ce que Cooley fasse comparaître un témoin, qui aurait connu le futur ministre des affaires étrangères quand il appartenait à une cellule communiste.
Critique de Tootpadu
Tout comme le film suivant de Otto Preminger n’allait pas réellement traiter de la foi, ni des bonnes actions qu’elle peut inspirer, celui-ci montre très peu d’activité politique concrète, ni les retombées positives pour la communauté qu’elle peut générer. Le scénario alambiqué de Tempête à Washington consiste plutôt en une série de viles manœuvres et autres fourberies, qui caractérisent le quotidien dans la jungle de la capitale américaine. Quand, à la fin d’un récit presque absurde, deux hommes sont morts et la probité de la classe politique est sérieusement mise en doute, ces représentants du peuple font comme si de rien n’était et continuent aussi stoïquement qu’auparavant dans leur travail nébuleux. Cette indifférence s’inscrit parfaitement dans la lignée des conclusions peu rassurantes, à l’image de celle d’Autopsie d’un meurtre où l’innocence de son client importait moins à l’avocat que la possibilité d’enchaîner sur une affaire encore plus lucrative.
Le monde politique tel qu’il est décrit dans ce film vieux d’un demi-siècle a beau avoir changé entre-temps, il répond toujours aux mêmes règles d’un pouvoir suprême qui en a assez de se justifier auprès d’une assemblée démocratique. L’équivalent de nos jours de la procédure d’investiture au forceps d’un ministre primordial pour la prospérité du pays seraient ainsi les tractations pour gérer les difficultés financières de l’Europe en dehors du champ d’influence des parlements. Peu importe les motivations du président pour le choix de son poulain, ses tactiques pour faire aboutir la farce d’un processus d’approbation en disent long sur l’état moral de la politique américaine à l’époque, et à plus forte raison encore aujourd’hui, quand le cirque de Washington trouve un forum médiatique qui suit avidement ses moindres faits et gestes.
Pourtant, Otto Preminger est tout sauf la conscience morale de Hollywood. On le soupçonnerait presque de prendre un malin plaisir à attribuer le seul rôle d’un homme intègre au vice-président, ce dignitaire fantoche qui ne sert à pratiquement rien dans le mécanisme implacable de la politique américaine. Car tous les autres mènent au moins un double jeu, à travers un tour de saltimbanque entre leur fidélité de façade et l’avancement secret de leurs propres intérêts. Les méthodes peuvent certes varier entre la vieille garde, qui veut se donner un air de respectabilité acquise avec l’âge, et la jeune génération, impétueuse et sans scrupules. Mais tous les politiciens véreux sont impliqués, d’une manière ou d’une autre, dans un réseau de mensonges et de coups bas, duquel tout idéalisme moral a été évacué depuis très longtemps.
D’un point de vue narratif, ce drame sur les arcanes de la politique américaine risque parfois d’adopter un rythme trop pondéré. De même, son traitement de l’homosexualité est assez frileux et infesté de préjugés pour laisser littéralement dans le caniveau le seul personnage qui s’en réclame. Néanmoins, la volonté du scénario de passer d’un protagoniste à l’autre, sans s’émouvoir outre mesure du sort de ces points d’identification passagers, correspond tout à fait à l’état d’esprit global du film. Ce dernier souligne la cruauté d’un système, où l’importance de l’individu dépend directement de son degré d’utilité pour faire avancer l’agenda des détenteurs du pouvoir.
Revu le 12 septembre 2012, à l’Action Ecoles, Salle 2, en VO
Note de Tootpadu: