Jusqu'à ce que la fin du monde nous sépare

Jusqu'à ce que la fin du monde nous sépare
Titre original:Jusqu'à ce que la fin du monde nous sépare
Réalisateur:Lorene Scafaria
Sortie:Cinéma
Durée:101 minutes
Date:08 août 2012
Note:
Quand la tentative de faire exploser l’astéroïde Matilda qui fonce à toute vitesse en direction de la Terre échoue, il ne reste plus que trois semaines à l’humanité avant sa fin apocalyptique. Dodge, un conseiller en assurances plutôt terne, ne sait pas trop comment passer ses derniers jours jusqu’à l’échéance fatidique, et cela d’autant moins que son épouse vient de le larguer. Face à une situation qui se corse, il décide finalement de partir à la recherche d’Olivia, le premier amour de sa vie. En tant que compagnon de voyage, il n’a trouvé personne d’autre que sa voisine Penny, une jeune femme au caractère imprévisible, qui s’en veut terriblement d’avoir raté le dernier avion qui aurait pu la réunir avec sa famille en Angleterre.

Critique de Tootpadu

Lorsque le cinéma américain veut nous faire frissonner sur la fin des temps, cela se traduit presque toujours par des cataclysmes spectaculaires qui ne laissent que peu de place à une réflexion approfondie sur les conséquences d’un tel événement à l’issue inéluctable. Le premier film de la réalisatrice Lorene Scafaria se démarque sensiblement de cette logique pérenne des scénarios catastrophes, puisqu’il emprunte davantage la voie défaitiste et pourtant passablement optimiste que les frères Larrieu avaient exploré en France avec Les Derniers jours du monde. Les étapes successives de l’odyssée d’un héros improbable ne vont pas aussi loin ici, en termes d’absurdité et de perversité, que dans ce dernier. Nous sommes néanmoins sortis étrangement revigorés de Jusqu’à ce que la fin du monde nous sépare, comme si la confrontation romantique avec quelque chose de nullement édifiant nous avait ouvert les yeux sur ce qui compte réellement dans une existence trop souvent perçue comme acquise.
Le récit sait en effet se concentrer avec une sobriété tout à fait appréciable sur l’essentiel dans la quête impossible de la dernière chose qu’un homme et une femme mal assortis aimeraient accomplir avant la disparition de toute vie sur Terre. Il y a certes quelques indicateurs de l’anarchie qui risquerait forcément de gangrener notre civilisation, dès que les enjeux les plus basiques du maintien de l’espèce n’auront plus cours. Mais ces pillages et autres signes de vandalisme gratuit ont au mieux un impact secondaire sur le rapprochement entre Dodge et Penny. Ce sont surtout les moments plus calmes et chastement intimes, alors que le compte à rebours fait défiler les jours qu’il reste à vivre, qui confèrent une force intérieure à leur relation, seulement démentie tant soit peu par une montée finale des eaux de rose tout de même un peu exagérée.
Auparavant, la dynamique de la narration atteint cependant un équilibre plutôt réussi entre les subtilités de ce gain en appréciation mutuelle et les manifestations les plus bizarres d’une société en état de décomposition avancée. Les deux personnages principaux y déambulent en quelque sorte à travers un paysage fantasmagorique, où les rencontres restent brèves et éphémères. Ce mouvement de passage perpétuel sert à mieux indiquer que le cœur de l’intrigue ne se situe pas du côté de la découverte d’aspects insoupçonnés d’un pays avant sa disparition imminente, mais de celui du rapprochement à tâtons de deux êtres qui se seraient royalement ignorés en temps normal. Grâce à une mise en scène qui ne cède jamais au potentiel théâtral, voire tragique, d’une telle romance, cette histoire au dénouement aussi prévisible que déprimant se distingue par une dose considérable de dignité et d’affirmation de la vie, peu importe les circonstances.

Vu le 13 août 2012, à l’UGC Ciné Cité La Défense, Salle 2, en VO

Note de Tootpadu:

Critique de Mulder

En cette fin de période estivale, il arrive très rarement d'être agréablement surpris par un film indépendant qui a pour seule vocation de nous divertir intelligemment et de nous interroger sur notre existence même. Sur un postulat très simpliste, qui renvoie aux films relatifs à la fin du monde (Armageddon, Melancholia), ce film nous présente un agent d'assurance abandonné par sa femme et sa rencontre avec une de ses voisines. Tout semble opposer ces deux êtres. Ils vont pourtant apprendre à se connaître et à s'aimer et finir ensemble sur cette Terre qu'un météore va ravager.

Lorene Scafaria signe ici son premier film en qualité de réalisatrice et scénariste et réussit à enrichir l'approche de cette fin du monde en enlevant toute trace d'effets spéciaux spectaculaires, afin de se recentrer sur une étude des comportements humains. Face à une fin proche, elle montre bien que chacun a sa propre façon d'appréhender ses dernières heures (repas entre amis, suicide, visite de sa famille), voire que certains continuent à vivre normalement. La réussite de cette peinture sociale repose notamment sur d'excellents seconds rôles, tenus par des acteurs de cinéma qui ont fait leurs preuves dans des séries américaines ( William Petersen ("Les experts"), Martin Sheen) et surtout par le couple très original tenu par l'excellent Steve Carell et la sublime Keira Knightley. Ces deux comédiens réussissent à alterner les grosses productions et les films indépendants et semblent préférer les scénarios originaux et excellents aux piètres comédies américaines formatées.

Malgré la lenteur du film et son pessimisme total, c'est avec intérêt que nous suivons l'évolution de ces personnages plus vrais que nature. Ce film est l'exemple parfait des productions qui nous attendent dans la sélection officielle du festival du cinéma américain de Deauville. Il s'agit de l'assemblage d'un bon scénario, d'un budget étriqué et surtout de comédiens excellents qui tiennent cette œuvre fièrement.

Les nombreuses scènes du film vont présenter une vision d'une société qui a perdu ses repères et dans laquelle le climat social est fait d'émeutes, de paralysie au niveau des transports et d'une sensation de danger permanent. Pourtant, l'amour semble vouloir subsister jusqu'à ce que la fin du monde sépare ces deux êtres faits l'un pour l'autre et qui se sont enfin rencontrés, mais trop tard ...

Film à éviter pour ceux en pleine déprime, mais à voir pour tous ceux qui, comme moi, apprécient non seulement la sublime présence de Keira Knightley mais aussi la puissance de jeu d'une actrice entière et indomptable.

Vu le 20 août 2012, au Gaumont Disney Village, Salle 15, en VF

Note de Mulder: