Vénus beauté [Institut]

Vénus beauté [Institut]
Titre original:Vénus beauté [Institut]
Réalisateur:Tonie Marshall
Sortie:Cinéma
Durée:106 minutes
Date:03 février 1999
Note:
A son travail dans un institut de beauté, Angèle est une confidente et presque une figure maternelle pour ses collègues Samantha, revêche, et Marie, naïve, ainsi qu’un pilier pour la gérante Nadine, qui sait qu’elle peut compter sur cette employée modèle pour faire tourner la boutique. Dans sa vie privée, cette quadragénaire désillusionnée par l’amour enchaîne les rencontres sans lendemain. Jusqu’au jour où le sculpteur Antoine la remarque lors d’une scène de rupture publique avec un de ses amants passagers et tombe éperdument amoureux d’elle.

Critique de Tootpadu

On n’entend plus tellement parler de Tonie Marshall. Son dernier film sorti il y a quatre ans (Passe-passe) était – comme les tours du même nom – passé quasiment inaperçu, et depuis, c’est le calme plat autour de la réalisatrice. Et pourtant, avec le seul film pour lequel on risque de se souvenir d’elle, celui-ci en l’occurrence, elle a excellé dans le domaine de la trivialité chorale comme peu de cinéastes avant ou après elle. Seule Danièle Thompson a repris tant soit peu le flambeau, alors qu’elle n’était à cette époque-là qu’aux balbutiements de cette formule passée de mode, avec La Bûche. Le portrait d’un microcosme hautement banal acquiert dans Vénus beauté (Institut) ses lettres de noblesse, le temps d’une romance improbable et bancale comme le cinéma français n’aime plus trop les faire de nos jours.
En revoyant ce lauréat du César du Meilleur film en dehors de son contexte contemporain, une certaine nostalgie s’empare forcément de nous : celle d’une ambiance parisienne sous l’ère furtive de Jean Tiberi, celle des montants exprimés en francs, voire indirectement celle d’une jeunesse irrévocablement révolue, où pareil spectacle mélodramatique nous paraissait surfait et artificiel. L’expérience de la vie qui s’est passée entre-temps, de gré ou de force, a rendu notre appréciation de la vie d’Angèle plus aiguë. Derrière l’agitation de l’activité au salon, où l’on soigne autant les névroses féminines qu’on combat les rides et autres signes indiquant le vieillissement, cette femme meurtrie par une seule et unique relation amoureuse à l’issue tragique nous renvoie à notre propre désespoir romantique, maintenant que nous approchons de son âge où les options s’amenuisent avec chaque année qui passe. Elle le fait cependant, au fil d’un récit qui alterne parfaitement entre les accents comiques et plus sérieux, dans le registre du conte de fées à la fois lucide et douceâtre, qui n’est jamais dupe de sa propre imposture sentimentale.
Le défile d’une distribution royale, qui mélange adroitement les vedettes du passé (Micheline Presle, Emmanuelle Riva, Bulle Ogier), du présent (Nathalie Baye et Mathilde Seigner), ainsi que celles qui étaient promises à un futur finalement pas si rose que cela (Audrey Tautou et Samuel Le Bihan), n’est alors que la cerise sur le gâteau d’un film, dont la justesse du ton surprend presque autant, treize ans après sa sortie, que son affinement avec le temps.

Revu le 13 mai 2012, à la Cinémathèque Française, Salle Henri Langlois

Note de Tootpadu: