Titre original: | Incendies |
Réalisateur: | Denis Villeneuve |
Sortie: | Cinéma |
Durée: | 130 minutes |
Date: | 12 janvier 2011 |
Note: | |
Les jumeaux Jeanne et Simon Marwan n’ont connu de leur mère Nawal que son côté distant et impénétrable. Après sa mort, ils tombent des nues à l’ouverture de son testament, qui leur demande de remettre une lettre à leur père, qu’ils croyaient mort, et à leur frère, dont ils ignoraient jusqu’à l’existence. Tandis que Simon reste d’abord hermétique à la dernière volonté de sa mère, Jeanne part au Moyen-Orient, à la recherche des racines profondément enfouies de sa famille.
Critique de Tootpadu
La complexité temporelle du récit de ce film canadien, l’adaptation d’une pièce de théâtre signée Wajdi Mouawad, aurait facilement pu mener à une déroute narrative généralisée. Le va-et-vient constant entre l’enquête des enfants et le périple en temps de guerre de la mère constitue le genre de dispositif alambiqué, qui a tendance à nous agacer. A notre grand soulagement, la mise en scène de Denis Villeneuve s’acquitte admirablement de la tâche de tisser ces deux fils disparates en un seul flux épique. Incendies finira certes par trébucher, mais ce n’est pas la mise en abîme astucieuse à travers les décennies qui est à l’origine du résultat final pas entièrement convaincant.
Il y a en effet deux aspects inhérents à l’intrigue, qui relativisent considérablement notre adhésion émotionnelle au destin tragique de la famille Marwan. Pour commencer, l’attention exclusive que le scénario porte à la jeunesse de Nawal et au travail de deuil atypique de ses enfants ne laisse volontairement guère de place au temps que les trois ont dû passer ensemble. En nous donnant au mieux quelques indices quant au quotidien de cette famille d’immigrés, l’intrigue nous prive assez cruellement du cœur de l’affection que la mère a certainement éprouvé à l’égard de sa progéniture retrouvée, même si elle n’a visiblement pas toujours su le montrer. A moins que cette absence ne soit censée fonctionner tel un symbole, comme pour mieux indiquer la vie gâchée par les atrocités subies par Nawal, elle fait reposer la structure narrative autrement habile sur un fondement aux pieds d’argile.
Notre plus grande réserve à l’égard de ce film point dépourvu d’images fortes se base par contre sur son dénouement tortueux. Dans un sursaut démesuré, tout droit emprunté à la tragédie grecque et au mythe oedipien, les enfants découvrent avec une emphase hautement mélodramatique le terrible secret de leur famille, qui avait fini par achever leur mère. Ni eux, ni le film n’arrivent à se remettre complètement d’un tel acharnement maléfique du destin. Ainsi se termine dans une emphase suffocante un récit, dont les traits fins du début nous avaient donné l’espoir d’une issue plus subtile.
Vu le 4 janvier 2011, à la Salle Pathé Lincoln, en VO
Note de Tootpadu: