Ces garçons qui venaient du Brésil

Ces garçons qui venaient du Brésil
Titre original:Ces garçons qui venaient du Brésil
Réalisateur:Franklin J. Schaffner
Sortie:Cinéma
Durée:118 minutes
Date:30 mai 1979
Note:
Le docteur Josef Mengele, l’ancien médecin-chef du camp de concentration d’Auschwitz, coule des jours paisibles au Paraguay, où il continue en toute impunité ses expériences barbares et ses recherches génétiques. Il y convoque un groupe d’anciens nazis, restés fidèles à l’illusion d’un 4ème Reich, afin de leur confier une mission secrète : assassiner 94 hommes âgés à travers l’Europe et les Etats-Unis avant qu’ils n’atteignent leur 65ème anniversaire. Le jeune activiste juif Barry Kohler surveille Mengele et transmet ses informations au vieux chasseur de nazis Ezra Lieberman, basé à Vienne, avant d’être assassiné par Mengele et ses hommes. Intrigué par ce plan insensé d’exécutions apparemment arbitraires, Lieberman engage à son tour des recherches pour établir un lien entre ces cibles potentielles.

Critique de Tootpadu

La chasse au nazis sur un ton grand-guignolesque : de toute évidence le cinéma américain de la fin des années 1970 cherchait désespérément des emplois pas toujours adéquats pour sa vieille garde. Il n’y a en effet aucune pénurie de légendes à constater dans ce thriller grotesque, où Gregory Peck, Laurence Olivier, et James Mason tiennent le haut de l’affiche, soutenus par une distribution prestigieuse à laquelle appartiennent du côté âgé Lilli Palmer, Uta Hagen, Denholm Elliott, Michael Gough, et Wolfgang Preiss, et du côté plus jeune Steve Guttenberg, John Rubinstein, Bruno Ganz, et Sky Dumont. Dommage alors que tous ces acteurs de renom soient mis au service d’une histoire absurde, qui n’est à la hauteur ni du sujet sérieux qu’elle traite, ni d’une telle abondance de talent.
Les décors exotiques et le semblant de tension insufflé au récit par la musique de Jerry Goldmsith cachent plutôt mal l’indécision flagrante de la mise en scène de Franklin J. Schaffner et l’opportunisme trivial du scénario. L’enquête de l’équivalent fictif de Simon Wiesenthal, que Laurence Olivier joue avec une grandiloquence et un faux accent péniblement caricaturaux, se traîne ainsi sans le moindre suspense et ponctué de rencontres incongrus, avant de culminer dans un affrontement final, qui n’a pas peur de lorgner vers les films de série Z, leurs effets de maquillage excessivement sanglants et leurs revirements improbables jusqu’à ce que tout le monde s’écroule par terre. Même avant, la narration embrassait avec une certaine gêne les aspects plus viscéraux de l’intrigue, par exemple en laissant l’œil de la caméra fixé plus longtemps que nécessaire sur les seins dénudés de la domestique du repère tropical de Mengele ou en enfonçant lourdement le clou sur la méchanceté sans équivoque de ce dernier, grâce à ses vociférations à l’égard du traître présumé et de sa femme hideuse lors de la réception nazie. Or, le réalisateur ne fait à aucun moment preuve de la volonté et du courage indispensables pour entamer une relecture originale de son sujet délicat. Le respect qu’il paraît éprouver envers la démarche entêtée de Lieberman, au point de lui conférer un cachet scientifique par le biais de la rencontre avec le chercheur en biologie, ne s’accorde guère avec la mégalomanie outrancière de son adversaire. De cette dichotomie naît par conséquent un film décevant sur les deux tableaux : celui de la leçon d’histoire à la gloire de la résistance et du refus d’oublier, ainsi que celui d’un spectacle sanguinaire dont la seule ambition serait de faire appel aux bas instincts d’un public venu pour se divertir.
Au moins la conclusion s’inscrit parfaitement dans la continuité de l’opportunisme nullement jouissif qui a dû motiver cette production dispensable, puisqu’elle constitue, après L’Exorciste de William Friedkin et La Malédiction de Richard Donner, un point final assez pitoyable à ce thème cher au cinéma d’horreur des années 1970, qu’était la nature diabolique des enfants.

Revu le 14 novembre 2010, au Quartier Latin, Salle 1, en VO

Note de Tootpadu: