
Titre original: | Amelia |
Réalisateur: | Mira Nair |
Sortie: | Cinéma |
Durée: | 111 minutes |
Date: | 14 avril 2010 |
Note: | |
En 1928, quelques mois seulement après la traversée historique de Charles Lindbergh, l'aviatrice américaine Amelia Earhart est la première femme à voler sur l'Atlantique. Son exploit galvanise les foules, même si elle n'a pas été aux commandes de son avion. Son aventure s'inscrit en effet dans une stratégie commerciale minutieusement élaborée par son agent, l'éditeur George Putnam. Grâce à sa renommée et à l'argent récolté à travers des tournées de conférences et des campagnes publicitaires, Amelia Earhart pourra réaliser ses ambitions les plus folles, comme la traversée transatlantique en solitaire en 1932 ou le tour du monde en 1937.
Critique de Tootpadu
Quelle drôle de coïncidence que cette biographie filmique sur le pionnier de l'aviation au féminin sort très discrètement en France la même semaine qu'un nuage de cendres volcaniques venu d'Islande paralyse les échanges aériens dans toute l'Europe à un niveau jamais vu auparavant ! Ces deux événements étrangement liés ont au moins pour effet de nous inciter à ne plus considérer la mobilité accrue de notre époque comme quelque chose de naturel. Que ce soit de nos jours la pagaille au sol à cause de l'interdiction de voler émise par précaution de la part des autorités européennes, ou autrefois l'élan d'exploration de l'aviatrice téméraire sans laquelle l'Histoire du transport aérien se serait probablement déroulée autrement, le fait de s'élever tel un oiseau au dessus des nuages ne devrait jamais aller de soi.
Dans ce même ordre d'idées, la réalisatrice Mira Nair érige par le biais d'Amelia un monument à la mémoire de l'ambition sans bornes de son personnage principal. Elle le fait toutefois avec une subtilité et une absence de pathos, qui distinguent son film de la multitude d'oeuvres semblables, avec laquelle les Etats-Unis se complaisent à célébrer un passé marqué par des actes héroïques, rendus encore plus exemplaires quand ils sont contemplés à travers les verres déformants du mythe. La mise en perspective de l'existence d'Amelia Earhart depuis le point de vue de son vol fatidique ne dénote pas ici comme une contrainte scénaristique, qui permettrait une relecture lourde de sens des autres événements marquants de la vie de la héroïne. Elle procède davantage à une sorte de suspension poétique du récit, sans que les étapes qui mènent à ce défi ultime n'aient une utilité narrative clairement établie pour accroître l'intensité émotionnelle du désespoir, juste avant la disparition en mer.
Car la découverte de l'essence même du personnage historique autour duquel s'agence le film ne paraît jamais figurer tout à fait dans le cahier des charges de la réalisatrice. Le scénario nous présente certes quelques moments emblématiques de la vie d'Amelia Earhart. Mais en même temps, ses accomplissements ne donnent guère lieu à des envolées à la gloire du volontarisme et du dépassement de soi. En dépit de son exposition au public et de son style de vie contraire aux bonnes moeurs de l'époque, le personnage principal préserve une part d'ombre que la mise en scène délicate lui permet de garder pour elle, sans la moindre résistance formelle ou narrative. Dans le pire des cas, on pourrait y voir un laisser-aller de la part de Mira Nair, a priori préjudiciable pour la cohésion et la vigueur de son film. Nous préférons plutôt y déceler la signature décontractée d'une mise en scène, qui, comme son protagoniste, préfère la sensation de planer à l'obligation de fournir un résultat tangible en temps et en heure.
L'aspect technique d'Amelia est à la hauteur des ambitions de sa réalisatrice, c'est-à-dire d'une solidité et d'une beauté mesurées, qui ne détournent jamais sans raison l'attention de l'intrigue principale. Les interprétations de Hilary Swank et de Richard Gere ne sont pas en reste, puisqu'elles confèrent une sincérité et un enthousiasme lucide à ce film, qui aurait sans doute mieux valu que l'accueil public décevant qu'il a connu l'année dernière aux Etats-Unis et la distribution en catimini dans le reste du monde, qui s'en est ensuivie.
Vu le 20 avril 2010, au Publicis Cinémas, Salle 2, en VO
Note de Tootpadu:
Critique de Mulder
C'est avec un a priori, suite aux différentes critiques lues dans la presse, que je me suis rendu à la séance d’Amelia. Je m'attendais à un film très statique et interprété de manière peu convaincante et ce fut finalement une assez bonne surprise.
Ce film se base sur deux livres dédiés à Amelia Earhart, une aviatrice américaine, née à Atchison dans le Kansas le 24 juillet 1897, disparue dans la région de l'archipel des Kiribati le 2 juillet 1937, déclarée officiellement morte le 5 janvier 1939. Aucune trace de son appareil ne fut détectée, aucun témoignage ne fut recueilli sur les dernières îles qu'elle était censée survoler.
Voler était pour elle toute sa vie et sa grande force vint qu'elle put contribuer à l'essor de l'aviation aux Etats-Unis. Deux hommes firent partie intégrante de sa vie : son mari, George Putnam avait d'abord été son manager et c'est grâce à lui qu'elle put faire la traversée de l'Atlantique en qualité de commandant de bord, aidée de deux pilotes, puis la même traversée en solitaire. Elle ne put réussir cependant à réaliser son rêve le plus profond, soit de faire le tour du monde, la faute à un équipement insalubre. Elle y laissa sa vie, ainsi que celle de son navigateur. L’autre homme de sa vie, Gene Vidal, était aussi un passionné de la conquête du ciel et leur association permit l’essor des longs courriers.
Ce film retrouve à de rares moments le souffle des grands films d'aventure des années 1980, comme le classique Out of Africa. Le manque de rythme par rapport aux biographies filmiques, comme Aviator de Martin Scorsese, fait que nous suivons ce film sans être réellement captivés. Le problème intrinsèque de ce film est qu'il ne nous donne pas envie d'en connaitre plus sur ce personnage. Certes, cette aviatrice a contribué à la révolution de ce mode de transport en le démocratisant, mais ce film ne lui rend pas un hommage suffisamment appuyé. Nous préfèrerons de loin le film de Philip Kaufman, L'Etoffe des héros, qui arrivait à transcender la quête de l'espace pour en faire un grand et indémodable film d'aventure. La conquête du ciel a toujours occupé une grande place dans l'histoire humaine. De grands films ont donc surfé sur cette thématique, avec plus ou moins de succès. Amelia arrive donc un peu tard et son rythme nous renvoie trop aux films des années 1980.
Malgré les défauts scénaristiques et de réalisation de ce film, il y avait le potentiel requis pour en faire un film réussi. Le casting n'est pas en reste et Hilary Swank arrive à nous faire croire à son personnage. Nous sentons au travers de son interprétation qu'elle respecte cette femme par la force et la volonté à toute épreuve qui la caractérisent. Le fait qu'elle réussisse dans un monde d'hommes ne peut que forcer le respect et l'actrice, par sa ressemblance physique et psychologique avec Amelia Earhart, est un excellent choix. Son mari, prêt à tout pour la rendre heureuse au point d'accepter qu’elle ait une relation temporaire avec un autre homme, permet à Richard Gere de retrouver enfin un rôle intéressant. De même, le rôle de l'amant interprété par Ewan McGregor montre que cet excellent acteur est aussi à l'aise dans une comédie (Transpotting), un film de science-fiction (Star wars) qu’ici dans un drame. Le casting est suffisamment attractif pour pallier aux défaillances de ce film. Certaines vues de ce film et reconstructions historiques nous permettent aussi de nous évader loin de nos soucis quotidiens.
Ce film mérite donc d'avoir une seconde vie lors de sa sortie en DVD, après son passage guère remarqué en salles.
Vu le 20 avril 2010, au Publicis Cinémas, Salle 2, en VO
Note de Mulder: