Invités de mon père (Les)

Titre original: | Invités de mon père (Les) |
Réalisateur: | Anne Le Ny |
Sortie: | Cinéma |
Durée: | 95 minutes |
Date: | 31 mars 2010 |
Note: | |
Lorsque Lucien Paumelle, un ancien activiste en faveur de l'avortement, annonce à ses enfants, la généraliste Babette et l'avocat Arnaud, qu'il va mettre son engagement pour la cause des sans-papiers en pratique, en accueillant une famille de clandestins chez lui, sa famille approuve globalement cette action humanitaire. Les réactions sont déjà moins enthousiastes, entre l'incrédulité et l'étonnement amusé, quand il s'avère que les invitées de l'octogénaire sont Tatiana, une belle femme moldave, et sa fille Sorina. Enfin, rien ne va plus pour Babette et Arnaud, quand ils se rendent compte que leur père est fou amoureux de l'immigrée, et que le mariage blanc qu'il a conclu avec elle risque bien de leur coûter l'héritage.
Critique de Tootpadu
Après quelques soucis au démarrage, à cause d'une introduction qui rabâche mollement les éléments de l'intrigue déjà révélés dans la bande-annonce, le deuxième film d'Anne Le Ny se mue progressivement en une observation délicate sur les difficultés de l'immigration, depuis le point de vue d'une petite bourgeoisie bien intentionnée, mais incapable de mettre le bien des réfugiés avant le maintien de leur propre petit confort affectif et matériel. On pourrait reprocher aux Invités de mon père un certain opportunisme dans l'exploitation d'un sujet d'actualité aussi controversé que l'immigration. Mais le ton jamais tout à fait sérieux avec lequel la réalisatrice raconte la déroute de cette famille "bien comme il faut" ne permet pas le moindre apitoiement sur le sort des uns ou des autres.
Aussi divertissant soit-il, ce film privilégie un enracinement assez profond dans la réalité, à commencer par la situation de départ, qui reflète sans doute pertinemment l'état d'esprit des 68ards, qui, arrivés désormais à l'âge de la retraite, éprouvent une envie pressante de se rendre socialement utiles, toujours en accord avec leurs convictions d'antan. Mais c'est surtout la finesse de la description du désarroi des enfants qui séduit. Alors que le piège de la vulgarité ou de l'émancipation tardive, mais d'autant plus bruyante, guette à chaque instant, la narration modérée ne permet aucun écart vers les bassesses du théâtre de boulevard. Au contraire, elle s'emploie à une déconstruction méticuleuse des certitudes, notamment celle qui veut nous faire croire que nous connaissons intimement les gens à force de les avoir côtoyés pendant des années.
Enfin, l'interprétation de comédiens aussi éprouvés que Karin Viard, Fabrice Luchini, et Michel Aumont n'entrave en rien la douce mélodie d'un commentaire social, qui sait ramener les questions existentielles à un niveau très banal, dans laquelle excelle ce film. Point aussi grave et poignant que Ceux qui restent, le premier coup de maître d'Anne Le Ny, son deuxième film est cependant au moins aussi adroit dans la dissection de clichés potentiels, pour mieux relever les dessous égoïstes de notre société bien pensante et altruiste en apparence.
Vu le 14 avril 2010, au MK2 Bibliothèque, Salle 10
Note de Tootpadu: