Plein sud

Plein sud
Titre original:Plein sud
Réalisateur:Sébastien Lifshitz
Sortie:Cinéma
Durée:91 minutes
Date:30 décembre 2009
Note:
En route vers le sud, Samuel a pris les auto-stoppeurs Léa et son frère Mathieu. Alors que Léa ne sait pas si elle veut aller au bout de sa grossesse, Mathieu tombe amoureux de Samuel, qui reste indifférent à son égard. Après un arrêt à la station-service, le jeune Jérémie se joint au voyage, sur l'invitation désinvolte de Léa. Pendant tout le trajet, Samuel reste en retrait. Il a l'esprit ailleurs, plongé dans son enfance difficile, marquée par le suicide de son père et la folie de sa mère.

Critique de Tootpadu

Il neige dehors et il fait un froid de chien depuis une semaine : les conditions idéales pour une contre-programmation astucieuse, à travers un film plein de vie, qui nous rappellerait les bons souvenirs du soleil, de la plage, et du sexe, pour citer sauvagement Gainsbourg. C'était compter sans l'état d'esprit hivernal qui guide les personnages de ce troisième long-métrage de fiction de Sébastien Lifshitz. Plus fidèle que jamais aux thèmes forts de ses films précédents, le réalisateur procède ici au mieux à une relecture, voire à une continuation des intrigues du passé. Le fil rouge qui se tisse à travers sa filmographie, fait de mères souffrantes, de figures paternelles ambiguës, et d'un rapport tortueux avec l'homosexualité, exercera éventuellement un léger pouvoir de séduction sur les spectateurs qui suivent avec intérêt la carrière de Sébastien Lifshitz depuis ses débuts prometteurs avec Les Corps ouverts et Presque rien. Mais pour tous les autres, y compris ceux qui auraient souhaité que le réalisateur élargisse son champ de réflexion, Plein sud représente un exercice plutôt fastidieux.
Alors que la thérapie consécutive à la tentative de suicide dans Presque rien avait encore connu une certaine valorisation scénaristique par les retours en arrière récurrents vers la romance d'été passagère, mais heureuse, le même dispositif narratif tourne en rond ici, dans une spirale pratiquement sans issue d'apitoiement sur soi et de pulsions dépressives. Les quatre jeunes de ce film sont si désabusés et absorbés par leurs problèmes personnels, que l'établissement d'un lien émotionnel avec eux à travers leur triste sort n'est guère évident. Au lieu de poursuivre sa chronologie officieuse des types de personnages, qui était au plus tard devenu apparente dans Wild side, et qui aurait pu progresser avec le propre âge du réalisateur, ce dernier préfère opérer un retour, afin de ressasser encore et encore les peines existentielles des jeunes adultes.
La structure narrative du film, alambiquée à souhait, nous garde ainsi systématiquement à distance des personnages, dont les soucis ne nous font plus à force ni chaud, ni froid. Faute d'action et d'enjeux tangibles, l'intrigue suit à partir d'un certain point une logique dont elle et les psychoses des personnages détiennent seules le secret. Il devient en effet de plus en plus difficile de déceler le moindre sursaut d'un sentiment authentique sur ce terrain aride du recul, entretenu par les traumatismes du passé. Bien plus encore que les personnages des films précédents de Sébastien Lifshitz, ceux de Plein sud se sont faits eux-mêmes prisonniers à vie par leur propre détresse mentale. C'est en tout cas le constat peu reluisant que nous inspire ce film problématique, qui reprend le ton et les décors estivaux de Presque rien, sans en reproduire pour autant la douce et profonde mélancolie.
Au moins du côté de la découverte de nouveaux talents, Sébastien Lifshitz se montre toujours aussi prolifique. Tandis que le duo fraternel composé de Léa Seydoux et de Théo Frilet nous agace plutôt, la vigueur relative dans un film si anémique de Pierre Perrier et le malaise intériorisé de Yannick Renier trouvent davantage notre approbation.

Vu le 17 décembre 2009, au Club Marbeuf

Note de Tootpadu: