Mensonges d'état

Mensonges d'état
Titre original:Mensonges d'état
Réalisateur:Ridley Scott
Sortie:Cinéma
Durée:128 minutes
Date:05 novembre 2008
Note:
Alors que la menace d'attentats terroristes se concrétise en Europe, l'agent de terrain des services secrets américains Roger Ferris se lance à la recherche effrénée d'Al-Saleem, le chef présumé du réseau. Après avoir fait chou blanc en Irak, Ferris est envoyé par son supérieur, le vétéran Ed Hoffman, en Jordanie pour suivre la piste d'un centre suspect à Amman. Faute de moyens suffisants sur place, Ferris devra solliciter l'aide des services secrets jordaniens, menés par le redoutable Hani.

Critique de Tootpadu

Les règles du jeu de l'espionnage international ont profondément évolué, depuis que Tony Scott avait exploré le genre de façon plutôt ennuyeuse dans Spy games en 2001. L'incursion de son frère aîné Ridley prend mieux en compte la complexité désormais inextricable des relations internationales en général, et de l'obtention d'informations secrètes en particulier. En l'absence d'un ennemi clairement identifiable, la confiance est devenu une denrée rare dans le monde des espions de la guerre contre le terrorisme. Une guerre qui nourrit autant la paranoïa publique que la soif de contrôle des antagonistes aux idées fixes, laissant sur le carreau les individus qui croient encore à la dimension humaine de ce rouage international impitoyable.
Car Mensonges d'état est une fois de plus, dans l'oeuvre de Ridley Scott, un film qui suit le parcours d'un homme en contradiction avec le système qui le nourrit et auquel il n'arrivera à se soustraire qu'in extremis. Les dommages collatéraux sont en effet nombreux dans la croisade aveuglée des extrémistes de tout bord, qu'ils appartiennent aux services secrets de pays soi-disant civilisés ou aux groupuscules de martyrs fanatiques et intégristes. Il n'y a aucune gloire à tirer d'une guerre, où les cadavres des anciens collaborateurs ou des hommes de paille sont abandonnés sans état d'âme sur le bord de la route. Et il n'y a pas davantage une quelconque issue à envisager de ce climat de méfiance et de tension permanentes, tant que chaque parti mène son propre jeu de fourberies dans le but de préserver un nez d'avance illusoire sur ses adversaires.
Bien qu'il soit conté du point de vue américain, ce film n'en adopte pas pour autant le ton chauvin. A l'image de la stratégie de Hoffman et Ferris, qui nage surtout en plein milieu du film, lorsqu'il s'agit de changer de tactique face à une série d'échecs cuisants, le scénario ne s'appuie à aucun moment sur des certitudes irréfutables. Il met constamment en question la loyauté des uns et les objectifs des autres, jusqu'à dévoiler, tant que possible, l'enchevêtrement inextricable de l'échiquier international. Le résultat est un film jamais simpliste, même pas lors de l'arrivée de la cavalerie à la dernière minute, qui n'évite cependant pas toujours d'être happé par la nature embrouillée de son sujet.
Ridley Scott multiplie en effet les théâtres d'opérations et les missions, pour arriver à la conclusion presque frustrante que la guerre contre le terrorisme, tel qu'elle est menée actuellement, est forcément appelé à s'enliser. Dans l'affrontement entre la sophistication technique des Américains et l'ingéniosité des terroristes pour déjouer ce prétendu avantage opérationnel, ce seront donc toujours les civils les plus exposés et les agents avec quelques vestiges de scrupules, qui feront les frais de ce spectacle insensé.

Vu le 27 octobre 2008, à la Salle Warner, en VO

Note de Tootpadu: