Police sur la ville

Police sur la ville
Titre original:Police sur la ville
Réalisateur:Don Siegel
Sortie:Cinéma
Durée:97 minutes
Date:27 mars 1968
Note:
Un vendredi matin à la fin de leur service, les deux policiers Daniel Madigan et Rocco Bonaro procèdent à l'interpellation du voyou Barney Benesh. Ce qu'ils ignorent, c'est que Benesh est également recherché pour un meurtre, en plus de la complicité d'un délit pour lequel ils étaient initialement partis le chercher. Le criminel s'empare alors des armes de service des deux fonctionnaires et les enferme sur les toits de New York. Leurs supérieurs donnent trois jours à Madigan et Bonaro pour retrouver Benesh et leurs revolvers, faute de quoi ils seront suspendus. Le chef de police Anthony Russell est excédé par cette affaire de négligence, mais la probable trahison de son ami de longue date, le commissaire en chef Charles Kane, lui procure un casse-tête encore plus important.

Critique de Tootpadu

Ce policier dense fonctionne simultanément sur deux voies a priori opposées. D'abord, il permet une observation sans héroïsme du travail quotidien de la police à New York. La banalité des tâches à effectuer à tous les niveaux hiérarchiques dément la promotion d'idéaux réactionnaires, tout comme celle d'une efficacité factice, en décalage avec le renouveau perpétuel du crime dans les métropoles. Chacun fait son travail jour après jour, tout en sachant que l'intransigeance morale des uns et les méthodes à peine légales des autres ne sont que des subterfuges personnels et trompeurs pour ne pas devoir admettre l'impuissance des forces de l'ordre.
L'univers de la police de New York, tel qu'il est évoqué ici par Don Siegel, respire un état d'esprit profondément désabusé, une façon de faire blasée, qui ne se soumet plus à la dure routine du travail de flic par vocation, mais en dépit d'une usure dont l'habitude est l'élément le plus fatigant. Le chef de police vieillissant n'envisage en fin de compte son rôle, qui consiste à donner le même discours encore et encore aux nouvelles recrues et à gérer tant bien que mal les vicissitudes de ses responsabilités, avec plus de vigueur que l'inspecteur Madigan, un habitué de la rue, qui traîne son expérience et ses connaissances derrière lui, comme le bagage encombrant d'une vie sans perspective.
Et puis, cette approche presque documentaire, si ce n'était pour la mise en scène toujours aussi soignée et parlante de Don Siegel, alterne régulièrement avec des moments autrement plus banals, tout droit sortis d'une fiction romanesque ordinaire et, au moins pour l'époque, presque vulgaire. Les soucis de la vie privée, avec ces épouses qui s'ennuient devant la télé et ces maîtresses inaccessibles à la longue, prennent ainsi le dessus, de temps en temps, comme pour mieux parfaire cet instantané d'une époque. Car Police sur la ville est aussi, et ce n'est pas sa moindre qualité, un film de passage.
Le passage de la forme, puisque le ton du film, sa musique et son rythme, sans oublier sa mise en question fondamental du rôle du protagoniste, s'apparentent plus au style des années 1970 qu'à celui de la décennie dont il est issu. Et puis le passage des générations, qui dresse ici les agents de l'ordre une dernière fois, comme dans un chant de cygne, contre une culture foisonnante et juvénile, qui tire déjà les ficelles, mais pour laquelle des hommes de la trempe d'un Russell ne seront jamais prêts.

Revu le 27 mars 2008, en DVD, en VO

Note de Tootpadu: