
Titre original: | Libre arbitre (Le) |
Réalisateur: | Matthias Glasner |
Sortie: | Cinéma |
Durée: | 170 minutes |
Date: | 30 janvier 2008 |
Note: | |
Après avoir purgé une peine de neuf ans dans une institution psychiatrique pour viol, Theo Stoer se retrouve en liberté. Intégré dans un appartement d'anciens taulards et capable d'exercer son métier d'imprimeur, appris derrière les barreaux, Theo n'arrive cependant pas à maîtriser ses pulsions sexuelles. Un être meurtri et hanté par son rapport violent avec les femmes, il trouve une compagne inattendue en la personne de Netti Engelbrecht, la fille du patron de Theo, un père possessif qui a du mal à voir Netti quitter le foyer familial à 27 ans. L'amour paraît possible entre Netti et Theo, avant que le passé ne rattrape ce délinquant sexuel mentalement instable.
Critique de Tootpadu
Dans le cas d'un viol, il n'y a que des perdants. C'est la conclusion à laquelle arrive ce film allemand prenant, qui aborde ce sujet, prédestiné aux pires clichés et prises de position rassurantes, avec une sensibilité et une franchise qui méritent tout notre respect.
L'entrée en la matière est effectivement des plus éprouvantes, avec une scène de viol dont la barbarie réside autant dans la violence de l'acte que dans le désarroi mental du délinquant. Cette scène, à laquelle suivront d'autres, au moins aussi insoutenables, ne relève cependant pas du spectacle voyeuriste et cruel, mais d'une nécessité dramatique essentielle. Il manquerait à la rédemption laborieuse de Theo toute son ambiguïté morale, si le spectateur n'était pas conscient de la sauvagerie dont cet esprit tourmenté était physiquement capable. Dès lors, nous ressentons la tentation de la rechute à chaque apparition d'une femme au moins passablement attractive, et nous pouvons réellement prendre la mesure de ce mal instinctif et incontrôlable qui ronge le protagoniste de l'intérieur. Theo a beau être une bête, une bombe à retardement qui peut exploser à chaque instant, le scénario impartial ne perd jamais de vue sa dimension humaine, qui se manifeste principalement par son incapacité à mener une vie normale.
Le peu de bonheur auquel il a droit avec Netti, un être humain au moins aussi névrosé et renfermé que lui, cette parenthèse relativement courte d'une affection apparemment sincère, fonctionne en quelque sorte comme un pendant par rapport aux irruptions inquiétantes et gratuites de la violence, indispensable à la structure narrative du film. Parce que nous avons accompagné Theo dans les moments de sa vie, où il était en proie à la plus grande détresse et au plus grand bonheur, nous sommes émotionnellement préparés, mais guère prêts, à le suivre dans sa fin expiatoire. Une fin qui ne résout rien, tout comme la revanche cruelle d'une des victimes dans les toilettes n'est qu'un geste vain, un retournement de situation maladroit contre l'atrocité du viol, qui annihile tout.
Matthias Glasner prend son temps pour évoquer ce destin tragique. Au sein de son style dépouillé, qui se passe aisément d'une musique qui ne ferait qu'exacerber des sentiments déjà intenses, il s'appuie en première ligne sur ses acteurs, plus remarquables les uns que les autres. L'intensité physique et mentale de Jürgen Vogel n'est pas seulement inquiétante, mais elle capte aussi son impuissance face à un trait de caractère, une maladie ou une tare, peu importe comment on veut désigner la pulsion au viol, qui lui bouffe sans merci son existence. De même, Sabine Timoteo exprime l'insécurité de son personnage de manière déchirante, jusqu'à sombrer dans une tristesse hystérique finale, en parfaite symbiose avec son rapport détaché au monde. Enfin, Manfred Zapatka propose une autre facette de l'anéantissement social allemand, avec ce père égoïste, qui croit pouvoir garder sa fille en s'apitoyant sur lui-même.
Vu le 15 janvier 2008, au Club Publicis, en VO
Note de Tootpadu: