
Titre original: | Un homme presque parfait |
Réalisateur: | Robert Benton |
Sortie: | Cinéma |
Durée: | 110 minutes |
Date: | 27 septembre 1995 |
Note: | |
Dans la petite ville de North Bath, tout le monde connaît Sully Sullivan. Il permet à la propriétaire de son logement, la vieille Beryl Peoples, de garder un peu d'indépendance. Grâce à son tempérament d'éternel insoumis, il garantit des revenus réguliers à son avocat Wirf Wirfley. Et même s'il le déteste, il effectue de petits travaux de manutention pour Carl Roebuck, avec son meilleur ami Rub Squeers. On ne peut pas dire que Sully a réussi sa vie, mais il évite adroitement des responsabilités trop contraignantes, même sur ses vieux jours. Jusqu'à ce que son fils Peter revienne en ville pour la fête de Thanksgiving. Sully doit alors faire face à ses rôles de père et grand-père qu'il avait fuis toute sa vie.
Critique de Tootpadu
La sagesse est une denrée rare au cinéma. L'évoquer dans le contexte d'un film dont le protagoniste est un homme qui a tout faux doit forcément étonner. Mais ce Sully Sullivan est quelqu'un qui a su garder un peu d'humanité authentique et d'espoir pimenté d'auto-dérision face à l'adversité de la vie courante. Il est maladroit, grincheux et imprévisible, mais quelque part en dessous de cette carapace antipathique sommeille un être humain ordinaire. Dans son imperfection réside sa noblesse et le fait d'en être conscient, d'une façon plus alerte qu'il ne paraît, le rend profondément attachant.
Rien d'extraordinaire ne se passe dans cette petite ville. Le petit train-train quotidien évolue autour de choses complètement dérisoires, voire ridicules. Les habitants ne s'apprécient pas forcément, mais à force de vivre ensembles dans la même communauté, ils ont appris à s'arranger et à dépendre des autres malgré eux. Le portrait que le film dresse de cette vie en société est d'une justesse bienveillante de laquelle la campagne américaine ne jouit que très rarement. Ce n'est pas une évocation consensuelle des valeurs et moeurs fondamentales des Etats-Unis, puisque aucun des personnages déborde de caractéristiques exemplaires, au contraire. Et ce n'est certainement pas non plus une approche qui vise à tourner en dérision les aberrations de la quiétude d'une communauté peuplée principalement d'hommes et de femmes âgés.
Non, Un homme presque parfait est cette bête rare d'un film qui reste parfaitement sérieux dans le fond, mais qui se permet de rire amplement des turpitudes de son héros improbable. C'est justement l'absence de perfection, et la reconnaissance sans ménagement de celle-ci, qui rend l'histoire aussi engageante. Tandis que la cruauté sinistre de la vie réelle s'infiltre régulièrement dans l'intrigue (les rapports dysfonctionnels à tous les niveaux, l'alcoolisme, la pauvreté, la vieillesse), le ton n'abandonne jamais complètement son optimisme face à une adversité sans gloire.
L'humanisme désarmant du film repose autant sur le scénario impeccable de Robert Benton, dont la mise en scène est d'une sobriété exemplaire (à l'exception de l'image mentale de Sully au début), que sur une interprétation excellente. Paul Newman y livre son dernier rôle immense de vieillesse, au moins aussi poignant que son avocat alcoolique dans Le Verdict. Le reste de la distribution est également parfaitement choisi, avec des emplois inhabituels mais parfaitement maîtrisés de la part de Melanie Griffith, Bruce Willis et le jeune Philip Seymour Hoffman. Sans oublier une des dernières apparitions de l'irremplaçable Jessica Tandy.
Enfin, le thème magnifique de Howard Shore est peut-être la somme parfaite d'un film, qui nous rappelle que pour vivre, on n'est pas forcément obligé de réussir.
Revu le 29 septembre 2007, en DVD, en VO
Revu le 26 mai 2008, en DVD, en VO
Revu le 27 septembre 2008, en DVD, en VO
Note de Tootpadu: