99 F

99 F
Titre original:99 F
Réalisateur:Jan Kounen
Sortie:Cinéma
Durée:104 minutes
Date:26 septembre 2007
Note:
Octave évolue depuis des années au sein de la plus grosse agence de pub du monde, Ross & Witchcraft, en tant que rédacteur publicitaire. La rupture avec sa copine Sophie et une campagne particulièrement débile pour le fabriquant de yaourt Madone vont lui faire prendre conscience de la futilité de sa vie.

Critique de Tootpadu

Jan Kounen à la rencontre de Frédéric Beigbeder. Cette association entre le cinéaste en quête de spiritualité et l'auteur corrosif avait de quoi laisser dubitatif au début. Mais le film qui en est né se démarque tellement par son ton délirant, qu'on ne peut que s'en réjouir en fin de compte. Il figure comme un premier aboutissement du réalisateur dans la fiction, puisque ses feux d'artifice psychédéliques et vaines de Doberman et Blueberry ont enfin trouvé un fond susceptible de leur apporter un minimum de gravité. Certes, l'avancée vers le sérieux ne va pas aussi loin que dans ses deux derniers documentaires. Mais l'univers de la pub, débridé et exclusivement concentré sur l'apparence, impose de toute façon une approche bien plus délirante que le gourou indien de Darshan l'étreinte et le chamanisme dans D'autres mondes.
La symbiose entre les deux styles de l'écrivain et du cinéaste est telle qu'un foisonnement incessant d'idées et de figures mentales anime le récit. Jan Kounen s'en donne à coeur joie au maniement astucieux d'une structure narrative qui ne l'est pas moins. Le réseau de retours en arrière, nourri amplement aux références de la culture cinématographique la plus courante, fonctionne comme une plongée vertigineuse au coeur d'un environnemment professionnel qui n'en a pas. Pendant que notre protagoniste déjanté tombe dans une chute expiatoire, le film intuitif de sa vie se déroule devant nos yeux. Dans cette jungle de raccourcis et de rapprochements mentaux, plus besoin d'une narration sagement linéaire. Et Kounen et ses co-scénaristes vont encore plus loin, en proposant une fin alternative après le premier semblant de générique, qui ferme le cercle vicieux du bonheur trompeur, duquel Octave ne s'échappera jamais. Nous non plus d'ailleurs, comme le montre la toute première publicité des frères Lumière, après le véritable générique.
Enfin, l'impact du regard sur notre société médiatique et conditionnée est si important et durable, parce que l'ironie mordante du scénario n'hésite point à en relever les perversions. On a beau rire de la fausse pub assassine, qui est censé rendre à Octave une conscience tranquille, et des abus d'une vie perdue dans la drogue, nous sommes les proies de prédilection de la séduction venimeuse avec laquelle la pub cherche à nous appâter chaque jour. Rien que pour nous rappeler cette évidence sous une forme aussi divertissante, 99 F vaut la peine d'être vu !

Vu le 18 septembre 2007, au Planet Hollywood Champs-Elysées

Note de Tootpadu:

Critique de Mulder

99 F est l'adaptation du best-seller homonyme de Frédéric Beigbeder, sorti en 2000 aux Editions Grasset et vendu à plus de 500 000 exemplaires. Si ce portrait sous acide du monde de la pub, inspiré de la propre expérience de l'auteur, est ensuite ressorti sous les titres de 14,99 euros puis de 6,20 euros, les producteurs du film ont préféré garder le titre original pour son adaptation cinématographique.

Soyons directs et francs : 99f est une adaptation parfaitement maitrisée et réussie du roman cynique de Beigbeder.

Jan Kounen, qui nous avait déçus avec son raté Blueberry montre qu'il est de nouveau dans la course du meilleur jeune réalisateur actuel. Pour ce film, il a sorti l'artillerie lourde : scénario brillant et maîtrisé, Jean Dujardin (dans un de ses meilleurs rôles depuis OSS 117), montage brillant. Le résultat ne peut être qu'une excellente surprise, pleines d'idées du début à la fin, trash et déjantée. Certes, Jan Kounen fait honneur à la plume de Beigbeder (présent dans le film à plusieurs reprises), la trahissant en partie, mais pour lui rendre un des plus bels hommages. Il signe donc ici une comédie satirique bien rythmée du monde de la pub et de ses artifices.

Ce film montre à tel point le monde publicitaire est un milieu arrogant et impitoyable, prenant les consommateurs pour des moutons, des décérébrés. C'est avec brio que le film se sert de publicités existantes et ayant marquées nos mémoires pour dynamiser de l’intérieur le monde publicitaire !

Rares sont les films français actuels au bout desquels nous ne ressortons pas décus par une fin ratée, des scènes qui s'éternisent à l'infini, des scénarios mal finis. 99f s'impose donc comme une belle réussite du cinéma français et témoigne une fois de plus que Jean Dujardin est un acteur complet, aussi bien à l'aise dans un drame (Le convoyeur, Contre enquête) que dans des comédies (OSS 117, Brice de Nice, 99F). Nous l'attendons au passage pour sa prestation de Lucky Luke ...

Vu le 28 septembre 2007, au Gaumont Disney Village

Note de Mulder: