Glastonbury

Glastonbury
Titre original:Glastonbury
Réalisateur:Julien Temple
Sortie:Cinéma
Durée:138 minutes
Date:18 juillet 2007
Note:
Sur le site riche en mythologies et en traditions religieuses de Glastonbury, au sud-ouest de l'Angleterre, le jeune fermier Michael Eavis avait tenu un premier festival de musique en 1970. Au fil du temps, cette rencontre annuelle, chaque week-end du solstice d'été, a grandi pour devenir un événement incontournable à la fois en termes musicaux et pour préserver l'état d'esprit contestataire des années hippies.

Critique de Tootpadu

Les années hippies appartiennent à l'Histoire depuis des décennies, et avec elles leur innocence festive qui célébrait l'amour dans son état le plus débridé. D'autres formes d'affirmation sociale ont depuis pris la place de ce mouvement de contestation pacifique des années 1960 et '70. Mais le festival de Glastonbury a survécu, contre vents et marées, jusqu'à ce jour, puisqu'il se tient à nouveau cette semaine, fin juin, sous un mot d'ordre bien dans l'air du temps : la lutte contre le réchauffement climatique. Sa longévité dépend sans doute de cette capacité d'embrasser toutes les causes, tout en gardant à peu près son cadre rural et convivial.
Ce documentaire de Julien Temple opère à la fois sur deux fronts : une plongée dans la folie musicale que le festival recrée année après année, et le témoignage sur son évolution, pas toujours organique, mais néanmoins le reflet révélateur de notre époque. Fidèle à son style d'artiste visuel, Temple ne lésine pas sur les effets pour rendre l'expérience la plus intense possible. Le résultat probablement intentionnel de son montage très nerveux et des cadrages plutôt fou est un état d'épuisement au bout du film, à l'image de ces festivaliers, heureux d'avoir survécu à trois jours de sollicitations visuelles et auditives incessantes. Mais cette forme débridée et passablement abstraite permet également au spectateur d'avoir un aperçu grandeur nature de cette rencontre démesurée.
Car de la petite fête campagnarde, avec du rock parmi les vaches, le festival s'est transformé en une sorte de foire populaire, voire familiale, aussi bien gardée qu'un sommet du G8. De ses débuts modestes et hippies, en passant par le mouvement anti-Thatcher et l'implication des gens du voyage, jusqu'à son statut de date incontournable dans l'agenda international des festivals de musique, les grands traits de l'histoire de Glastonbury apparaissent clairement comme les signes d'une adaptation de l'événement à son public et aux préoccupations sociales spécifiques à chaque génération. Ce besoin constant de se réinventer a toutefois fait perdre au festival au moins une partie de son âme, celle-là même qui donnait la priorité à l'échange libre et joyeux, avant les impératifs commerciaux. Entouré d'une clôture ultra-sophistiquée et étroitement surveillée, le festival ne vit plus par la spontanéité et l'improvisation, mais par l'organisation précise et le contrôle musclé du moindre débordement.
Le documentaire pâtit de cette aseptisation de son sujet, dont la ténacité à exister dénature inextricablement l'essence. Moins débridé que L'Obscénité et la fureur, il lui manque en quelque sorte un véritable raisonnement, autre que l'observation d'un vieil éléphant de la culture populaire et musicale des années hippies.

Vu le 19 juin 2007, au Club de l'Etoile, en VO

Note de Tootpadu: