Lucky You

Lucky You
Titre original:Lucky You
Réalisateur:Curtis Hanson
Sortie:Cinéma
Durée:123 minutes
Date:09 mai 2007
Note:
A quelques jours du Tournoi International de Poker à Las Vegas en 2003, le joueur invétéré Huck Cheever a du mal à réunir l'argent nécessaire pour s'inscrire. L'arrivée de Billie Offer, une chanteuse débutante, et le retour de son père, une légende des tables de poker, avec lequel il est en mauvais termes, vont lui permettre de voir à quel point il devrait inverser son style de vie, mesuré, et le côté flambeur dans son rapport passionnel aux cartes.

Critique de Tootpadu

Pas besoin de connaître toutes les astuces du jeu de poker pour apprécier ce retour de Curtis Hanson à un cinéma de qualité solide. Sans détrôner la référence en la matière depuis plus de quarante ans, Le Kid de Cincinnati de Norman Jewison, le film conte avec beaucoup de sympathie la lente prise de conscience d'un joueur compulsif. L'argent s'y gagne aussi vite qu'il se perd et les parties successives répondent exactement à cette même logique. Le but du poker, dans le cadre fictif de ce film, n'est pas forcément de remporter le pot, mais de rester dans le jeu, d'anticiper le bluff et de tenter au moins de saisir sa chance. Grâce à la lucidité du scénario, la chance tourne sans arrêt, ce qui souligne encore plus la futilité du jeu. Vous aurez un ultime clin d'oeil de cette moquerie sur la passion des paris stupides, si vous restez dans la salle jusqu'à la fin du générique.
Mais de la même façon que L.A. Confidential n'était pas qu'un simple policier d'époque, que Wonder Boys se plaçait loin des comédies d'université banales, et que In Her Shoes ... - ah non, celui-là faisait tache dans la filmographie de son réalisateur, et dans sa conformité au genre, et dans sa médiocrité - donc, en somme, comme la plupart des films antérieurs de Curtis Hanson, Lucky You est avant tout une histoire sur la difficulté de la vie et le peu d'espoir qu'il faut cultiver malgré tout, pour repartir à la fin avec un sosie de Veronica Lake ou la femme de son chef. Les problèmes auxquels Huck Cheever doit faire face n'ont rien d'original (un père à qui il a du mal à pardonner, une copine auprès de laquelle il ne veut pas s'engager), mais le traitement très solide de l'histoire permet de la rendre attachante. Curtis Hanson y reste entièrement fidèle à lui-même, puisqu'il ne cherche point l'esbroufe ou la surenchère de revirements artificiels. Au contraire, avec la linéarité de la narration et le ton très sincère du film, il se pose comme le dernier artisan de Hollywood, capable de ne pas duper son public.
Car l'apparence simple du film ne signifie nullement qu'il est bête ou simpliste. Les ellipses courantes apportent un rythme soutenu et l'enjeu humain de l'intrigue, sans la moindre faille de crédibilité, contribue à l'authenticité de l'ensemble. Cette véracité va même jusqu'au chant de Drew Barrymore, qui s'est enfin décidée à interpréter elle-même ses chansons, après le doublage peu convaincant dix ans plus tôt dans Tout le monde dit I Love You. Le résultat est des plus séduisants et il ne faut donc plus s'inquiéter des futurs rôles musicaux de l'actrice. Par contre, l'engagement amoureux auprès d'hommes obsédés devient presque une constante effrayante dans la filmographie de Barrymore, après le fan de baseball inconditionnel dans Terrain d'entente.
Il n'y a pas de quoi crier au miracle, face à ce film très sympathique. Mais au moins, son réalisateur nous prouve une fois de plus à quel point il maîtrise les bases essentielles de son métier. Et notre théorie sur ses capacités artisanales reste donc sauve, jusqu'à son prochain film au moins.

Vu le 3 mai 2007, à la Salle Warner, en VO

Note de Tootpadu: