Chronique d'un scandale

Chronique d'un scandale
Titre original:Chronique d'un scandale
Réalisateur:Richard Eyre
Sortie:Cinéma
Durée:92 minutes
Date:28 février 2007
Note:
Barbara Covett est une prof d'histoire solitaire et vieillissante dans le collège d'un quartier populaire à Londres. Dépourvue d'ambitions si proche de la retraite, elle n'a que son journal et son chat pour se confier. Jusqu'au jour où Sheba Hart, une jeune prof d'art, prend ses fonctions. Les deux femmes se lient d'amitié, une relation qui révélera les pulsions de l'une et le désespoir de l'autre, lorsque Sheba s'éprend d'un de ses élèves.

Critique de Tootpadu

Il existe deux sortes de méchants qui marquent durablement la mémoire du spectateur : d'un côté l'incarnation du mal, une bête sauvage et perfide qui ne recule devant aucun méfait, et de l'autre des individus désespérés et proprement tragiques, dont les actes abjectes ne sont égalés que par leurs tourments intérieurs. Barbara Covett est de ces derniers, une femme qui chasse encore des rêves au crépuscule de sa vie, quitte à détruire les gens qui l'entourent. Sa quête de l'amour est presque touchante, mais elle revêt en même temps les couleurs laides du désespoir, de la solitude et du calcul égoïste. Sa banalité la rend d'autant plus redoutable qu'elle correspond parfaitement à ces vieilles filles, honorables et d'une autre époque, qui font partie intégrante de notre société. Et au fond, les seuls reproches véritables que l'on pourrait lui faire sont de profiter du désarroi sentimental de sa collègue, tout en cherchant à calmer ses propres frustrations émotionnelles.
Pour incarner ce personnage difficile, le choix de Judi Dench était des plus judicieux. Elle traduit parfaitement les différentes facettes de Barbara, à commencer par son apparence pas très soignée. Aucun trait du caractère complexe de son personnage n'échappe à Judi Dench, qui brille autant dans les petites victoires que dans les moments les plus pénibles. Cette interprétation magistrale, qui est sans doute la plus vive et imprévisible de la part de l'actrice depuis longtemps, ne nous fait pas pour autant oublier l'humanité et la vulnérabilité de Barbara. Ce n'est pas une folle et pas non plus un être vil et mal intentionné, juste une vieille femme seule qui aspire encore à un bonheur qui lui a été refusé pendant toute sa vie. Grâce au tour de force de Judi Dench, elle déverse tout son venin sans accomplir son rêve, mais sans non plus anéantir les vestiges tenaces de notre sympathie.
Heureusement que l'actrice principale, épaulée par une Cate Blanchett également très en forme, mène ce film prenant avec une main de maîtresse. Car ses autres éléments sont déjà moins exceptionnels. Comme la musique de Philip Glass, répétitive et envahissante à souhait, qui remplit bien trop souvent le rôle dirigeant de la mise en scène. Richard Eyre s'appuie en plus largement sur la voix off de Dench, une façon peu sophistiquée d'éviter des trouvailles visuelles ou proprement cinématographiques plus élaborées. Enfin, la banalité de l'histoire, dépourvue de grands sursauts dramatiques, ainsi qu'une vision un peu rétrograde de l'homosexualité empêchent le film dans son ensemble d'atteindre le même niveau d'excellence que Dame Judi Dench.

Vu le 12 décembre 2006, au Club de l'Etoile, en VO

Note de Tootpadu: