Queen (The)

Queen (The)
Titre original:Queen (The)
Réalisateur:Stephen Frears
Sortie:Cinéma
Durée:103 minutes
Date:18 octobre 2006
Note:
Le 31 août 1997, Diana, la princesse de Galles, meurt des suites d'un accident de voiture à Paris. Le monde entier est sous le choc et le deuil est particulièrement vif au Royaume-Uni. Alors que des miliers d'Anglais affluent devant Buckingham Palace pour y poser des fleurs en souvenir de Lady Di, la reine Elizabeth II reste à l'abri du battage médiatique dans sa résidence d'été de Balmoral. Son silence face à ce qu'elle considère comme une affaire privée ne va cependant pas tarder à lui attirer les foudres de la presse. Le nouveau premier ministre Tony Blair tente alors de limiter les dégâts pour la monarchie.

Critique de Tootpadu

Comme les temps ont changé. Alors que l'avenir de la reine Elizabeth II, voire de la monarchie anglaise tout court, ne tenait qu'à un fil pendant l'été 1997, et que Tony Blair était le porteur rayonnant d'un espoir nouveau pour le Royaume-Uni tout entier, la situation presque dix ans plus tard est diamétralement opposée. La reine tient toujours aussi fermement son sceptre, ayant survécu à sa mère adulée et à sa soeur conspuée, et la carrière politique du premier ministre vit ses derniers mois hautement pénibles. En vue de l'approche du pouvoir dont ses deux dirigeants font preuve dans ce film très intelligent et fin, une telle issue et une telle différence de longévité politique ne sont finalement pas si surprenantes que cela.
Le récit sophistiqué de cette semaine mémorable se met en effet à la recherche des motivations profondes pour le comportement trop détaché de la reine, ses conséquences et son impact à la durée discutable sur l'opinion publique anglaise. Le scénario magistral de Peter Morgan et la mise en scène raffinée de Stephen Frears restent volontairement à l'écart de toute euphorie sensationnelle. Comme preuve, leur traitement elliptique de l'accident fatidique qui surplombe cependant tel un souvenir douloureux les événements suivants. La raison d'être de ce film n'est ainsi point l'émission d'hypothèses sur la culpabilité dans la disparition de Diana, mais le passage au peigne fin d'une famille royale complètement coupée de la réalité de son pays. L'incongruité du comportement d'Elizabeth et de son entourage sert ainsi de moteur jubilatoire à un film riche en sentiments réprimés et en observations hilarantes.
La justesse du propos est d'autant plus impressionnante que Frears et Morgan entreprennent un acte d'acrobatie narrative hallucinant. Face au désarroi d'une reine dépassé par les événements, le rire vient en effet aussi naturellement que l'émotion. Avec un état d'esprit très "british", les péripéties de la reine en déroute prêtent en effet autant à la dérision qu'à une sympathie mêlée de pitié.
Enfin, comment ne pas évoquer le jeu magnifique de Helen Mirren dans le rôle titre ? Elle habite complètement ce personnage revenu de tout, qui a tellement assimilé sa responsabilité royale que sa nature humaine ne se manifeste plus qu'à la rencontre avec la beauté naturelle. Logiquement, Elizabeth ira donc plutôt admirer la dépouille du cerf que celle de son ancienne belle-fille mal aimée.
Et puis, il y a même une petite touche française dans la noblesse de l'exécution, grâce à la bande originale d'Alexandre Desplat qui est, faute d'un terme plus approprié, majestueuse.

Vu le 6 octobre 2006, à la Salle Pathé Lincoln, en VO

Note de Tootpadu: