Oedipe roi

Oedipe roi
Titre original:Oedipe roi
Réalisateur:Pier Paolo Pasolini
Sortie:Cinéma
Durée:104 minutes
Date:09 octobre 1968
Note:
Dans la ville de Thèbes, Jocaste et Laïos ont un fils. Alors que le jeune Oedipe est la fierté de sa mère, son père craint d'être un jour évincé par lui. Laïos fait emmener son fils dans le désert, où une mort certaine l'attend. Mais le garçon est trouvé par un citoyen de la ville de Corinthe qui l'offre au roi Polybe, jusqu'alors sans héritier. Devenu adulte, le prince Oedipe entend des rumeurs selon lesquelles ses parents l'auraient rejeté. Pour avoir l'esprit tranquille et connaître la vérité, il se rend à l'oracle de Delphes. Toutefois, la prophétie qui lui est révélée le bouleverse au plus haut point : il tuera son père et il couchera avec sa mère.

Critique de Tootpadu

Déjà le trublion aussi admiré que vilipendé du cinéma italien dont on se souvient encore de nos jours, plus de trente ans après sa mort, Pier Paolo Pasolini entreprend un projet ambitieux, voire osé, avec cette adaptation libre de la tragédie de Sophocle. Quasiment à mi-parcours d'une oeuvre cinématographique entre le discours social (Accatone, Mamma Roma) et l'interrogation des moeurs (la trilogie érotique et Salo), Oedipe roi indique les premiers signes de la maturité, tout en conservant la rage artistique qui rend chaque film du réalisateur intéressant, quoique pas toujours réussi.
L'effet de la mise en scène de Pasolini s'avère d'ailleurs être des plus curieux. L'approche frontale de la plupart des séquences brise la distance théâtrale et élève cette intrigue antique au rang de pamphlet perturbateur et agressif. La caméra colle au plus près des visages qui s'agitent dans leur quête inutile d'échapper au destin. Cette proximité insistante et viscérale rentre dans un rapport d'opposition particulièrement poétique avec les longs plans contemplatifs des cités et des traditions anciennes. Car parallèlement à sa fonction d'adaptateur d'une intrigue mythique, Pasolini se permet également quelques écarts ethnologiques. Son intrusion dans les terres arides de l'Afrique du Nord ne révèle probablement pas de faits scientifiques probants, mais elle contribue un élément majeur à l'impact sensuel de son film. Un éveil des sens qui est relayé, comme souvent chez ce premier réalisateur à l'homosexualité révendicatrice, par le regard érotique qu'il porte sur les hommes.
Une oeuvre polymorphe et brute, Oedipe roi ne convainc cependant pas entièrement dans sa dimension tragique. Le regard magnifique de la sublime Silvana Mangano lorsqu'elle allaite le petit Oedipe exprime ainsi plus de tourments de l'âme que toute l'agitation employée pour accomplir la prophétie maudite.

Vu le 28 octobre 2006, au Majestic Bastille, Salle 1, en VO

Note de Tootpadu: