Brubaker

Brubaker
Titre original:Brubaker
Réalisateur:Stuart Rosenberg
Sortie:Cinéma
Durée:126 minutes
Date:14 janvier 1981
Note:
Henry Brubaker arrive dans la prison de Wakefield comme détenu. Pendant quelques jours, il prend le temps de se rendre compte de la dure réalité de la vie carcérale. Seulement après il dévoile sa véritable identité : il est le nouveau directeur, envoyé par l'assistante du gouverneur pour réformer la prison physiquement et moralement délabrée. Mais ses méthodes radicales, qui visent à donner plus de responsabilité aux criminels, ne plaisent ni aux gardiens et aux détenus chargés de la surveillance, ni à ses supérieurs qui craignent des retombées médiatiques et économiques négatives.

Critique de Tootpadu

Les conditions de détention dans les prisons américaines se sont certainement déteriorées depuis la production de ce drame social, il y a un quart de siècle. Tel qu'elles sont décrites pendant les premières minutes du film, elles suffisent cependant à dresser un tableau désolant et désespérant du quotidien derrière les barreaux. Le dispositif employé, à savoir de montrer d'abord la misère pour ensuite avoir un plus grand impact émotionnel lorsque le héros tente de l'améliorer, a beau être conventionnel, il ne rate point sa cible ici. Grâce à l'absence de complaisance et à la suggestion adroite des horreurs commises hors champ (le coup de fil), cette première partie est d'une efficacité à toute épreuve et d'une honnêteté relative qui fait un peu défaut à la suite, légèrement trop chargée idéologiquement.
Une fois sa véritable identité révélée, le personnage-titre se transforme en effet en une sorte de héros impeccable, dont le seul défaut mineur est d'aller jusqu'au bout de ses convictions humanistes. Cela est évidemment à l'honneur de la vedette socialement engagée, le très solide Robert Redford, mais cette attitude têtue et sans reproche est difficilement tempérée par quelques considérations politiques et diplomatiques. Redford joue une fois de plus ici un homme trop pur pour les compromis véreux du monde administratif. Si cette blancheur de caractère se prête parfaitement à l'érection d'un idéal qui véhicule une très forte valeur de modèle, elle rend les enjeux dramatiques du film un peu trop simplistes. Entre le côté positif qu'occupe exclusivement Brubaker, soutenu par de rares détenus assez téméraires pour le suivre dans son pari dangereux, et la majorité des méchants, comprise des gardiens et des responsables publics trop attachés aux traditions, seuls deux personnages réussissent à garder une certaine ambivalence. Mais même ces deux-là, le gardien Coombes et l'activiste Lillian Gray, répondent un peu trop aux conventions narratives, qui exigent un retournement final pour le premier et une victoire douce-amère pour la seconde.
En dépit de son idéologie un peu trop largement administrée à certains moments, Brubaker est un film d'une très grande solidité. Ainsi, la mise en scène de Stuart Rosenberg nous épargne presque toute fioriture inutile, puisqu'elle sait se concentrer sur l'essentiel. De même, l'interprétation est sans reproche et au service d'une histoire qui sait en fin de compte museler son optimisme.
Un film remarquable qui mérite bien plus votre attention que le deuxième séjour en prison de Robert Redford vingt ans plus tard, dans l'infiniment plus médiocre Dernier château !

Vu le 10 mars 2006, en DVD, en VO

Note de Tootpadu: