
Titre original: | Chasse à l'homme |
Réalisateur: | Fritz Lang |
Sortie: | Cinéma |
Durée: | 103 minutes |
Date: | 15 juin 1949 |
Note: | |
En Allemagne, pendant l'été 1939, le célèbre chasseur britannique Alan Thorndike s'approche de la résidence d'Adolf Hitler pour essayer de le tuer. Ses motivations sont cependant purement sportives, puisqu'il ne pense pas sérieusement de le tuer, mais seulement de prouver que ce serait possible. Les forces allemandes qui l'appréhendent ne voient point l'incident de la même façon et elles veulent obliger Thorndike, sous la torture, d'admettre qu'il a agi sous l'ordre du gouvernement britannique. Le chasseur résiste aux menaces, mais même libéré et de retour en Angleterre, il devra fuir les services secrets allemands et les forces de l'ordre de son propre pays, qui veulent éviter un incident diplomatique majeur en ces temps tendus.
Critique de Tootpadu
Au cours de la Seconde Guerre mondiale, la production hollywoodienne contribuait sa part à la défense de la patrie, en sortant un nombre important de films de propagande. Chaque réalisateur était invité à participer au moins une fois à cet effort de guerre, nécessaire surtout pendant les premières années du conflit, lorsque l'issue apparaissait encore incertaine. Pour les cinéastes refugiés, qui avaient fui la menace hitlerienne, cette obligation venait encore plus naturellement, puisqu'elle démontrait, de façon certes un peu trop ostentatoire, qu'ils étaient reconnaissants envers leur pays d'accueil, et qu'ils condamnaient les agissements de leurs anciens compatriotes. Ainsi, l'heure de Fritz Lang pour s'atteler à cette tâche patriotique fut venu avec ce thriller de traque à l'homme, son sixième film aux Etats-Unis.
Même si les impératifs du contexte sont tangibles tout au long du film, Lang arrive à les contourner assez habilement par moments. L'exposition a alors beau être tortueuse et la fin se dresse comme un exemple des messages naïfs qui plombaient ce genre de film - sans oublier que la mission du héros était déjà devenue caduque lorsque le film sortait en France, après la guerre -, il existe quand même suffisamment de séquences intéressantes pour impliquer un spectateur des années 2000. Certes, la chasse à l'homme du titre peine à prendre de l'allure et reste assez répétitive dans son dispositif. Mais certains éléments annexes démontrent la patte magistrale du réalisateur.
D'abord, l'histoire d'amour entre Thorndike et Jerry Stokes, une fille franche qu'il rencontre par hasard, est un exemple savoureux des vestiges de la comédie de moeurs à l'américaine des années 1930. Le changement de ton qui s'opère à ce moment là est fortement bénéfique au film, tellement il pimente une intrigue qui commençait à battre de l'aile. Les chamailleries entre elle et lui, son désir à elle de suivre cet homme généreux, et le refus de ce dernier de l'impliquer dans sa situation dangereuse, tout cela apporte une fraîcheur et un coeur à cette histoire qui en manquait auparavant. Dans ces moments d'amour incompris et du jeu sentimental du chat et de la souris, l'écriture du scénariste Dudley Nichols excelle, alors qu'elle peinait plutôt à nous intéresser au stratagème alambiqué des nazis au début. Et l'interprétation des deux vedettes est très agréablement complémentaire, le genre de feu d'artifice dramatique qui nous fait regretter cette époque lointaine.
Ensuite, quelques pétits détails arrivent toujours à distinguer ce film de commande du gros de la production des films de propagande de l'époque. Que ce soit la maturité affectée du jeune Roddy McDowall, le combat dans le métro qui devrait figurer parmi les premiers dans son genre, ou bien la façon ingénieuse de Thorndike de se débarrasser de ses adversaires à la fin, il y a régulièrement un petit quelque chose d'original qui dénote positivement.
Vu le 23 janvier 2006, à la Cinémathèque Française, Salle Georges Franju, en VO
Note de Tootpadu: