
Titre original: | Ames grises (Les) |
Réalisateur: | Yves Angelo |
Sortie: | Cinéma |
Durée: | 106 minutes |
Date: | 28 septembre 2005 |
Note: | |
En pleine Première guerre mondiale, une jeune institutrice arrive dans un village près du front. Elle est hébergée chez le vieux procureur, un homme renfermé et sévère. Lorsqu'elle est sans nouvelles de son amant, elle se donne la mort. Un accident, suivi bientôt d'un assassinat, qui mettra en question la réputation du vieux notable.
Critique de Tootpadu
Ne vous laissez pas berner par la bande-annonce qui a tenté de vendre cette adaptation d'un roman de Philippe Claudel comme un banal policier. En réalité, la démarche d'Yves Angelo est bien moins triviale et attachée aux sensations et coups d'éclat superficiels. D'un ton presque contemplatif, son film est soucieux de capter un fragment de la folie qui régnait sur une société dévorée par la guerre. Le choix du décor est emblématique en ce sens, puisque ce dernier se trouve juste assez loin du front pour ne pas subir l'agitation des batailles, mais trop près pour éviter le flux incessant de soldats qui marchent vers les tranchées et de mutilés qui en reviennent. Comme sous le feu des canons, la vie a perdu beaucoup de sa valeur dans cette extrémité de la république, où la fonction publique sombre dans la démence (la première séquence qui donne d'emblée le ton du désespoir), ou, pire encore, dans un cynisme des plus noirs (le procureur et le juge d'instruction se valent parfaitement dans leur dédain pour l'humanité). Les symboles que le réalisateur emploie pour souligner cette déchéance ne sont peut-être pas toujours tout frais - comme par exemple ce retour vers l'enfance à la fin. Mais l'atmosphère fortement automnale dans laquelle il plonge son film lui confère une mélancolie des plus nobles.
Yves Angelo aime bien ses acteurs, au point de leur coller à la peau avec une caméra numérique aux couleurs en parfaite harmonie avec la noirceur de l'intrigue. Et il sait tirer des interprétations exceptionnelles de ses comédiens de renom. Là encore, Marielle et Villeret se valent dans leur jeu très dense, qui garde une ombre mystérieuse très appréciable autour de leurs hommes de loi, l'un qui est un nostalgique qui regrette l'innocence et la beauté de la jeunesse, et l'autre qui n'aime pas que la bonne chair, mais aussi les pièges adroitement tendus.
Vu le 28 septembre 2005, à l'UGC Lyon Bastille, Salle 4
Note de Tootpadu: