Keane

Keane
Titre original:Keane
Réalisateur:Lodge Kerrigan
Sortie:Cinéma
Durée:94 minutes
Date:21 septembre 2005
Note:
La fille de William Keane, un peintre trentenaire au chômage, a été enlevée dans une gare routière il y a six mois. Depuis, le père n'arrive pas d'accepter cette disparition et il espère retrouver la trace de son enfant grâce à la fille d'une voisine dans son hôtel.

Critique de Tootpadu

Dans ce troisième film de Lodge Kerrigan, tout tourne autour du personnage principal, un homme solitaire et perturbé qui n'arrive pas à se remettre de la disparition de sa fille. Ce drame du passé qui surplombe la première partie du film, avec le retour de William sur le lieu du crime et sa tentative désespérée de retrouver le coupable, il joue un rôle bien plus subtil dans la seconde partie, lorsque la rencontre avec la mère et sa fille casse le cercle de l'isolation et rouvre la plaie de souvenirs pénibles. En même temps, il constitue le seul lien qui rattache le protagoniste à la vie réelle, loin de la déchéance de la drogue, de l'alcool et du sexe anonyme. Essentiellement un clochard en devenir, William fait les seuls efforts d'hygiène et de propreté des vêtements en vue des retrouvailles illusoires avec sa fille. Et ce sera cette autre fille, Kiara, qui le poussera à l'acte, à la reconstitution des circonstances de l'enlèvement, une étape supplémentaire vers l'acceptation des faits et de la culpabilité.
La charge de la responsabilité négligée pèse en effet sur ce personnage perturbé qui s'adonne à toutes sortes de fuites imaginaires. Cependant, le spectateur reste toujours au plus près de lui, à travers une caméra qui le laisse très rarement quitter le cadre. L'absence d'intimité nous fait alors assister à quelques séquences particulièrement éprouvantes (la chanson dans le bar, la traque dans la gare en pleine nuit), des instants d'une vie brisée, qui était peut-être déjà auparavant mal en point (le mystère du handicap, la facilité de consommation de drogues). Mais dans toute la tristesse de la vie déprimante de William, qui nous est présentée de façon certes minimaliste, quoiqu'insistante par sa proximité constante envers l'acteur, il apparait une toute petite lueur d'espoir dans ce dernier moment, magnifique dans sa simplicité.
Damian Lewis, connu surtout pour sa participation à "Band of Brothers", habite avec une intensité rare son personnage en plein malaise existentiel. Grâce à lui, ce dernier prend chair et nous laisse apercevoir les tristes manifestations d'une descente aux enfers d'une psychologie perturbée. Néanmoins, son jeu se trouve limité par l'attachement presque collant de la caméra à lui. L'oppression devient alors suffocante, là où un peu d'air et d'espace, un peu d'intégration dans un environnement, auraient pu dégager des pistes de réflexion plus diversifiées.

Vu le 23 septembre 2005, à l'UGC Ciné Cité Bercy, Salle 34, en VO

Note de Tootpadu: