Godzilla

Godzilla
Titre original:Godzilla
Réalisateur:Gareth Edwards
Sortie:Cinéma
Durée:123 minutes
Date:14 mai 2014
Note:

En 1999, l’ingénieur Joe Brody perd sa femme lors d’une catastrophe à la centrale nucléaire dans laquelle ils travaillaient tous les deux au Japon. Quinze ans plus tard, alors que les autorités ont depuis longtemps classé l’affaire, Brody croit toujours dur comme fer qu’un terrible secret se cache derrière l’incident aux conséquences néfastes pour toute la région. Son fils Ford, un démineur haut gradé de l’armée américaine, aurait préféré tourner la page. Mais l’arrestation de son père en pleine zone de quarantaine l’oblige à revenir au Japon. Il y assiste à la découverte d’un horrible monstre venu des profondeurs, qui deviendra une menace pour l’humanité toute entière.

Critique de Noodles

Godzilla est sans doute le monstre le plus célèbre du septième art, au vu du nombre impressionnant de films qui lui ont été consacrés. Sa première apparition ne date pas d’hier puisque c’est en 1954 qu’il prend vie au cinéma, dans le film éponyme réalisé par Ishiro Honda et produit par la Toho. Succès immédiat, il révolutionne le Kaiju Eiga (c’est-à-dire le film de monstres) et donnera lieu à une multitude de suites. Au total, plus de trente long-métrages japonais mettent en scène l’immense lézard qui, lorsqu’il ne constitue pas lui-même une menace pour l’humanité, vient au secours de cette dernière en affrontant des adversaires plus farfelus les uns que les autres. Pourtant, avant d’être le monstre culte au centre de films parfois assez légers (voire carrément ridicules), Godzilla est surtout l’incarnation métaphorique de la menace de l’arme nucléaire, redoutée par un peuple japonais traumatisé par les bombardements d’Hiroshima et de Nagasaki.

Bien qu’étant une icône du cinéma japonais, Godzilla n’aura pas mis longtemps à traverser l’océan Pacifique. En effet, en 1956, un nouveau montage du film de Honda sort aux Etats-Unis sous le nom de Godzilla, King of the Monsters! Mais il faudra attendre 1998 pour qu’il devienne le sujet d’un blockbuster hollywoodien, à travers la caméra de Roland Emmerich qui surfe alors sur la vague des films catastrophe à grand succès. Réalisateur du filmMonsters (2010), Gareth Edwards nous offre un nouveau remake, grosse production signée Warner. Si cette version est l’occasion de célébrer le 60ème anniversaire de la sortie de l’original d’Ishiro Honda, elle trouve également une justification dans l’actualité puisqu’elle voit le jour seulement  trois ans après le tragique évènement qui a secoué Fukushima.

Pour donner vie à Godzilla, une avalanche d’effets numériques faramineux a été déployée. Edwards, que l’on devine très inspiré par le travail de Spielberg notamment sur Les Dents de la mer (1975), choisit judicieusement de ne pas exposer le monstre de manière abusive, afin d’en accentuer l’aspect menaçant. Par contre, ce choix de réalisation ne s’applique pas aux adversaires de Godzilla, et ces gigantesques créatures à l’apparence peu séduisante sont bien trop présentes à l’écran. Pris entre deux feux, l’Homme tentent tant bien que mal de survivre en assistant impuissant à la destruction de sa société, tandis que les forces militaires démontrent pendant plus de deux heures leur totale inutilité face à une telle situation. Les créatures sont presque toujours filmées en contre-plongée, donc du point de vue humain, afin d’insister sur leur caractère écrasant et titanesque. Le spectaculaire est plus que jamais au rendez-vous et quelques scènes sont assez époustouflantes visuellement, comme celle du saut en parachute effectué par les soldats.

Malheureusement, les ambitions cinématographiques de ce film hollywoodien à gros budget semblent bien maigres. Etrangement, il en vient même à ressembler à un genre de blockbuster dépassé depuis bien des années, tant il ne parvient pas à faire preuve de la moindre originalité. Bien entendu le héros est contraint de se séparer de sa famille, dont il reste sans nouvelles pendant qu’il est affairé à tenter de sauver le monde. Bien entendu il faut insister, par des plans sans aucune justification narrative, sur le fait qu’un maximum d’enfants est secouru. Et bien entendu, il faut montrer un animal échappant de justesse à la mort. A notre plus grand regret, le casting et le jeu des acteurs ne permettent pas de rehausser le niveau de ce remake assez décevant car terriblement peu novateur.

 

Vu le 12 Mai 2014, à la salle Warner, en VO.

Note de Noodles:

Critique de Tootpadu

Godzilla n’est plus que l’ombre de lui-même. Il serait sans doute abusif d’imputer cette fin de carrière peu reluisante au seul film de Roland Emmerich d’il y a seize ans, dans lequel le monstre japonais avait subi un assujettissement cruel aux besoins d’un blockbuster hollywoodien ennuyeusement formaté. Toujours est-il que cette créature fabuleuse, née du traumatisme nucléaire de son pays d’origine, ainsi que les craintes de contamination qui y sont inhérentes ne correspondent plus tellement aux préoccupations de notre époque, à cheval entre la peur passée du terrorisme sournois et les ravages à venir du changement climatique.

De tous les points de vue, Godzilla est une relique de la culture populaire, qui était autrefois pertinente en tant que réplique à des phobies concrètes, mais qui ne sert désormais plus qu’à caricaturer les spectacles cinématographiques du siècle dernier, comme l’ultime représentant d’un divertissement maladroit et approximatif. Sa nouvelle réincarnation ne sait visiblement pas trop comment réinventer le mythe. Car au lieu de faire passer le monstre par une cure de jouvence, le film de Gareth Edwards le cantonne aux seconds rôles, en confiant la vedette simultanément à des prédateurs d’une autre espèce et à une conception très archaïque de l’héroïsme à l’américaine.

Comme c’est toujours le cas dans les productions hollywoodiennes lourdement soutenues par les forces armées de l’Oncle Sam, quand les scientifiques sont arrivés au bout de leur sagesse, il ne reste plus que les gros bras de l’armée pour voler au secours de l’humanité. Ce discours désagréablement martial est quelque peu tempéré dans Godzilla. D’abord parce que la réflexion sur le règlement autonome de la nature par les différents savants qui étudient le phénomène étrange des dinosaures revenus à la vie prend une place plutôt importante au sein du récit. Et puis également à cause des hommes en uniforme, qui reconnaissent leur impuissance face au danger démesuré et qui prennent la mesure des choix cornéliens qu’ils doivent prendre pour mettre un terme à l’invasion. A moins qu’ils ne soient carrément dépeints en priorité comme des pères de famille exemplaires, qui se battent avant tout pour préserver le noyau de la culture traditionnelle américaine. Ce sont en effet les parenthèses plus émotionnellement chargées autour de la femme et du fils du protagoniste, qui sonnent le plus faux dans le cadre d’une narration, qui enchaîne sinon imperturbablement les scènes d’action plus ou moins réussies.

Enfin, le comble de l’ironie – que de mauvaises langues qualifieraient sans doute de tromperie sur la marchandise –, c’est que l’immense majorité de la destruction massive, montrée sans relâche pendant deux heures, n’émane pas de Godzilla en personne, mais d’autres monstres préhistoriques contre lesquels leur grand-père doit partir en guerre aux côtés de l’humanité. Cette dynamique narrative, qui veut attribuer une importance cruciale aux manœuvres des personnages alors qu’elles ne servent qu’à fournir les bêtes en nourriture nucléaire, s’opère au détriment d’une quelconque implication du spectateur dans une histoire, qui se contente essentiellement d’enchaîner docilement les passages obligés du film catastrophe.

En dehors d’une distribution qui apporte un tout petit plus d’humanité au spectacle que les acteurs sans envergure qui pullulent dans les films de Roland Emmerich, il n’y a donc pas grand-chose d’innovant à voir dans cette résurrection bancale d’une légende du cinéma. De toute façon, cette dernière s’est appuyée depuis toujours davantage sur sa valeur iconographique que sur la qualité intrinsèque des films dans lesquels elle apparaît.

 

Vu le 12 mai 2014, à la Salle Warner, en VO

Note de Tootpadu:

Critique de Mulder

Godzilla réalisé par Gareth Edwards est la seconde tentative d’un grand studio Hollywoodien à tenter de proposer une américanisation de l’un des monstres géants les plus populaires et appréciés après le simiesque King Kong. Dèjà en 1999, Roland Emmerich nous proposait sur la base d’un scénario qu’il avait coécrit avec le scénariste Dean Devlin sa propre version de ce monstre de la culture populaire japonaise. Sa version non seulement trahissait le mythe de ce Kaij? Eiga (film de monstre) mais n’arriva pas non plus à retenir notre attention. Son film n’était qu’un film de monstre géant avec un casting guère réjouissant (Matthew Broderick, Jean Reno, Maria Pitillo..). Depuis 1954, trente films ont vu le jour et fait de Godzilla dès le second film une créature protectrice de la civilisation humaine contre de monstres géants de différentes formes (le papillon géant Mothra, le dinosaure Baragon et même King Kong..). Les films de la Toho avaient un certain cachet kitsch en mettant dans la peau de ces monstres des cascadeurs en costume de latex. 
 
Les studios Legendary Pictures et Warner après avoir acheté les droits de Godzilla à la Toho décident de produire un film rendant hommage à cette saga qui s’était étalée sur plus de cinquante ans (1954-2004). Loin d’être un remake classique, le film se veut plutôt être un redémarrage de la saga, un reboot. Dans la conception de la créature, les scénaristes Max Borenstein et Dave Callaham font de ce Godzilla un monstre bipède aussi à l’aise dans l’eau que sur terre et possédant un souffle atomique. Il apparaît ainsi comme le protecteur des humains face à des monstres de toutes sortes et non comme une créature hostile. Ce film marque non seulement les soixante ans d’existence de Godzilla mais également met fin au partenariat signé entre Warner Bros et Legendary Pictures (maintenant sous partenariat avec Universal Pictures). Après avoir réalisé le film Monsters sur lequel il occupa différents postes (scénariste, directeur de la photographie, créateur des décors), Gareth Edwards  est choisi pour être le réalisateur de ce nouveau film. 
 
Le premier film Godzilla réalisé en 1954 Ishirô Honda faisait de Godzilla une créature vengeresse envers une civilisation non respectueuse de son environnement. La fin de ce film voyait la créature mourir et un second Godzillla fut présenté dès 1955 comme protecteur de la terre et des humains contre des créatures géantes et dangereuses. La thématique des dangers du nucléaire et des bombes atomiques est une thématique chère au Japon. Elle est ici reprise en toile de fond avec la même optique et sert de trame à l’explication de ces monstres gigantesques et destructeurs. Ce film présente donc Godzilla face à des Mutos (“Massive Unidentified Terrestrial Organisms”) ressemblant à des mantes religieuses géantes. Le réalisateur démontre dans ce second film qu’il est aussi à l’aise avec un micro budget qu’avec un budget colossal. Il en ressort que les multiple scènes de destruction sont très impressionnantes et le film atteint donc son objectif de nous divertir et nous faire frémir en même temps.
 
Loin de nous présenter son film du point de vue de ce monstre géant, il en fait un second rôle important et oriente l’angle de son film du point de vue des humains. Ainsi le scientifique Joe Brody verra sa femme mourir devant ses yeux dans une centrale nucléaire japonaise et n’arrêtera pas pendant une quinzaine d’années de connaître la cause de cette mort. Leur fils, Ford Brody militaire de carrière suite à l’arrestation de son père resté au Japon quittera les Etats-Unis pour non seulement retrouver son père mais également affronter des créatures préhistoriques hostiles. Le film s’oriente ainsi plus vers un film de guerre digne des grands films des années 70 dans lequel l’ennemi est caractérisé par des monstres impitoyables. Nous sommes ainsi loin de ces blockbusters américains préférant miser sur des scènes remplies d’effets spéciaux que sur des personnages suffisamment bien développés. Ce que ce film gagne en crédibilité et par la présence d’un excellent casting il le perd par l’absence de scènes de combat et par le peu de présence de Godzilla (il n’apparaître pas plus d’une heure après le générique d début du film). Le réalisateur a ainsi réussi sur son second film à prendre des initiatives intéressantes tout en remplissant le cahier des charges propres à ce type de film. La scène sur le Golden Gate montre que le réalisateur est aussi à l’aise dans une scène intimiste que dans une scène d’action à grande ampleur.
 
Cependant malgré tout Godzilla ne remporte pas notre totale adhésion car le scénario manque cruellement d’audace et semble vouloir plaire à tous et donc retire toute réelle angoisse par rapport au sort du personnage principal. Alors que le casting comprend des comédiens parfaits dans leur rôle (Bryan Cranston, Ken Watanabe, Elizabeth Olsen, Sally Hawkins, Juliette Binoche, David Strathairn), la seule fausse note semble avoir été de confier à Aaron Taylor-Johnson le rôle principal (Kick ass 1&2 (2010-2013), Captain America, le soldat de l'hiver (2014)). Il ne donne pas assez l’impression d’être complètement à l’aise dans son rôle et sa manière trop froide de faire vivre son personnage ne convient pas à ce film. De la même manière, nous aurions préféré avoir plus de  scènes dédiées au personnage de Elle Brody. Elizabeth Olsen parfaite dans son rôle aurait mérité de voir son personnage plus au centre de l’action et non dans un rôle trop disparate.
 
Certes, le film Godzilla n’est pas parfait mais contrairement à mes deux rédacteurs je dois avouer avoir passé un excellent moment à suivre ce film qui rend hommage au genre du Kaij? Eiga. Dans la continuité de Pacific Rim, même si il s’agit de deux approches différentes, le film atteint son objectif de respecter le mythe Godzilla et de réinventer un genre tombé en désuétude.  
 
Vu le 17 mai 2014 au Gaumont Disney Village, Salle 11, en IMAX 3D et VF

Note de Mulder: