Deces - Claude Chabrol

Par Tootpadu, 12 septembre 2010

Le cinéma français vit décidément une série noire cette année, puisqu'après la disparition d'Eric Rohmer en janvier et celle d'Alain Corneau il y a deux semaines, c'est au tour de Claude Chabrol de nous quitter. Le réalisateur, scénariste et acteur français est décédé ce matin à l'âge de 80 ans. Un des fondateurs de la Nouvelle vague, avec ses amis des Cahiers du cinéma François Truffaut et Jean-Luc Godard, Claude Chabrol laisse derrière lui une oeuvre immense de plus de cinquante films, à travers lesquels il exprimait une espièglerie très charmante, tout en désignant malicieusement les travers de la bourgeoisie française, pourrie jusqu'à l'os derrière sa fausse apparence de respectabilité.

Claude Chabrol avait su s'imposer dès ses deux premiers films en 1959, Le Beau Serge (Prix Jean Vigo) et Les Cousins (Ours d'or au festival de Berlin), tous les deux avec Gérard Blain et Jean-Claude Brialy. La reconnaissance n'allait pas faire défaut de sitôt à Chabrol, puisque son film suivant A double tour a valu à Madeleine Robinson la Coupe Volpi de la Meilleure actrice au festival de Venise. Le réalisateur a enchaîné jusqu'à la fin des années 1960 sur Les Bonnes femmes avec Stéphane Audran, Les Godelureaux, L'Oeil du malin, Landru, La Ligne de démarcation, Le Scandale, Les Biches, La Femme infidèle, Que la bête meure, et le chef-d'oeuvre Le Boucher.

Celui qu'on surnommait peut-être un peu trop facilement le Hitchcock français est resté tout aussi prolifique dans les années 1970, avec des films qui attiraient de plus en plus d'acteurs de renommée internationale comme La Rupture, Juste avant la nuit, La Décade prodigieuse avec Orson Welles et Anthony Perkins, Docteur Popaul avec Mia Farrow, Les Noces rouges, Les Innocents aux mains sales avec Romy Schneider et Rod Steiger, Les Magiciens avec Franco Nero et Gert Fröbe, Folies bourgeoises avec Bruce Dern, Ann-Margret, et Maria Schell, Les Liens du sang avec Donald Sutherland et Donald Pleasance, et Violette Nozière (Prix d'interprétation féminine à Cannes pour Isabelle Huppert et César du Meilleur second rôle féminin pour Stéphane Audran).

Claude Chabrol a ralenti la cadence et s'est concentré sur des sujets plus français pendant la décennie suivante, à travers Les Fantômes du chapelier, Le Sang des autres, Poulet au vinaigre, Inspecteur Lavardin, Masques, Une affaire de femmes, et Jours tranquilles à Clichy.

Pendant les vingt dernières années de sa carrière, Claude Chabrol a tourné quatorze autres films, de Docteur M jusqu'à Bellamy. Les trois chefs-d'oeuvre de cette dernière ligne droite sont indiscutablement La Cérémonie, Merci pour le chocolat, et La Fleur du mal. Mais les adaptations de Flaubert (Madame Bovary) et de Simenon (Betty), tout comme L'Enfer, L'Ivresse du pouvoir et La Fille coupée en deux témoignaient encore du style distingué et en même temps moqueur du réalisateur.

Scénariste de la majorité de ses films, Claude Chabrol a également fait l'acteur dans ses propres films et chez les autres, d'une façon anecdotique mais soutenue. Il a ainsi fait une apparition dans Les Jeux de l'amour de Philippe De Broca, Les Menteurs d'Edmond T. Gréville, Les Ennemis d'Edouard Molinario, Brigitte et Brigitte de Luc Moullet, Le Permis de conduire de Jean Girault, L'Animal de Claude Zidi, Les Voleurs de la nuit de Sam Fuller, Je hais les acteurs et L'Eté en pente douce de Gérard Krawczyk, Alouette, je te plumerai de Pierre Zucca, Avida de Benoît Delépine et Gustave Kervern, et Gainsbourg [Vie héroïque] de Joann Sfar.

Claude Chabrol était marié pendant seize ans avec l'actrice Stéphane Audran. Il est le père de l'acteur Thomas Chabrol et du compositeur Matthieu Chabrol, qui ont tous les deux travaillé régulièrement avec lui. Au fil de sa carrière, Claude Chabrol a été nommé quatre fois aux Césars, sans jamais en gagner.