Conference-de-Presse - Stand Clear Of The Closing Doors

Par Mulder, Deauville, 03 septembre 2013

Q: bonjour, j’aurai voulu connaître quelle était votre connaissance du trouble autistique avant de faire ce film et si l’acteur que vous avez choisi était lui-même autiste ?

Sam Fleischner: je connais un peu ce monde et c’est vrai que j’ai passé du temps avec beaucoup de personnes souffrant d’autisme et que cela m’a vraiment fait une impression très forte et en plus c’est en plus un sujet qui m’a toujours intéressé. Le jeune comédien Jesus Sanchez-Velez souffre d’autisme lui-même. C’est un enfant autiste mais ce n’est pas un enfant acteur. C'est-à-dire un de ces enfants aux Etats-Unis qui deviennent des comédiens et qui tournent beaucoup. Je ne voulais pas jouer avec un enfant qui avait déjà l’habitude de ce genre de choses. Je voulais vraiment arriver à trouver quelqu’un qui lui-même en tant que personne voit déjà le monde au travers de ce trouble. C’est important pour moi car je ne suis pas autiste et je ne voulais pas que cela soit deux personnes qui traitent de ce sujet. On entend beaucoup de gens aux Etats-Unis qui disent que lorsqu’on est autiste, on ne peut pas s’occuper de soi- même. On est dépendant de quelqu’un. On est obligé d’avoir quelqu’un pour nous accompagner. Ce jeune comédien, c’est quelqu’un qui n’était jamais allé acheter quelque chose dans une boutique ou quoi que ce soit. Il n’allait pas dans la rue marcher seul. Le fait de faire ce film, cela a ouvert les yeux de sa mère notamment sur le fait qu’il pouvait se prendre en charge et qu’il pouvait être indépendant. C’est aussi ici quelque chose d’intéressant car bien souvent on a l’impression que quand quelqu’un est autiste, en tout cas la manière dont la plupart des gens le ressente, celui-ci n’est pas autorisé à vivre sa vie de la manière qu’il l’entend. Le fait de faire ce film a permis à ce jeune comédien d’acquérir cette confiance en lui et pouvoir aller vers une vie indépendante. C’est une réussite de ce film.

Q: Je voulais vous féliciter pour ce film qui est très émouvant. La question que j’avais concerne le métro qui est dans le film. Celui-ci est quasiment le personnage principal à part entière. Je voulais savoir comment vous avez fait pour filmer les images aussi glauques et aussi magnifiques. Techniquement comment cela s’est passé ? Au niveau des autorisations, j’imagine que le tournage a duré des semaines dans le métro, est- ce que cela été compliqué d’obtenir des autorisations pour autant de plans dans le métro ? En tout cas bravo pour ces plans magnifiques.

Fleischner : aux Etats-Unis bizarrement il n’y a pas besoin d’autorisation pour tourner dans le métro. On peut tourner aussi simplement que cela. C’est même dans le petit carnet des règles du MCA, on a le droit de tourner. Mais, il y a deux règles. La première est que l’on ne peut pas utiliser de trépied. La seconde est de ne pas gêner les passagers qui vont et viennent dans les couloirs du métro ou dans le métro. Si on respecte ces deux règles on peut faire ce que l’on veut. C’est effectivement très pratique. En ce qui concerne les personnes dans le métro que vous voyez dans le film, c’est un mélange entre des acteurs et des personnes qui vont se trouver là ce jour-là et qui du coup se retrouvent dans le film. A quelques exceptions près, nous n’avons pas eu de problèmes par rapport à cela. Il y a eu quelques personnes qui ont refusé. Mais sinon, tout le monde était au contraire partant. Il n’y a pas eu de soucis pour trouver des extras. La plupart du film cela dit a été mis en scène. Tout ce que l’on voit, tels comédiens à tel endroit, cela a été mis en scène. Il y a pas mal de cet effet du hasard aussi qui a bien fait les choses et que l’on peut voir à l’écran. En ce qui concerne le lieu lui-même, à New York, il y a plusieurs lignes de métro et là en l’occurrence il s’agissait du train de la ligne A qui est unique et très intéressant. Il va en effet très loin. C’est une ligne qui traverse beaucoup d’endroits très différents les uns des autres. Notamment, cela passe par pas mal d’endroits qui démographiquement sont assez déserts. On a un vrai contraste d’un endroit à un autre tout en restant aussi dans le même métro. C’est vraiment intéressant. En c e qui concerne ce train également, il faut savoir qu’il y a plusieurs modèles différents dans le métro new-yorkais. Le métro peut être souterrain comme à Paris comme sur l’île de Manhattan et dans le Queens aussi. A Brooklyn, c’est plutôt des métros aériens et on voit ce qui se passe en dehors. Les modèles sont assez anciens. Ils sont de plus en plus souvent changés par de nouveaux modèles ou rénovés. Il y a aussi des modèles anciens. Ce sont ces modèles anciens qui m’intéressaient car la lumière était très chaude. Au contraire, les nouveaux modèles ont des couleurs blanches plutôt dures et pas intéressantes pour cette histoire. Le fait d’avoir ce métro qui passe à travers plusieurs tunnels et qui tout d’un coup passe d’un endroit à un autre tout à fait complètement différent c’est vraiment une impression qui était très forte sur moi. De manière plus pragmatique, quand on porte une caméra, c’est difficile de se trouver droit dans le métro à New York. On a des images qui bougent donc beaucoup. Justement, je ne voulais pas avoir cet aspect-là. Je voulais au maximum de la possibilité avoir vraiment des tableaux, des scènes les plus stables possibles avec un aspect le plus cinéma possible. Pour se faire, l’astuce que j’ai trouvée est qu’il faut savoir que dans le métro new-yorkais, il y a des barres sur le côté où on peut s’agripper pour ne pas tomber, on a donc tout simplement posé nos caméras sur ces barres via un système de vis et broches. Cela a donc rendu possible le fait de tourner dans le métro avec des images à priori le plus stable possible. Vous parliez également du métro en tant que personnage, c’est vrai qu’il y a ce thème que l’on voit d’ailleurs du dragon que dessine Ricky. Le métro devient quelque part ce dragon qui l’emmène vers le monde de la mer (la plage). Le métro en lui-même physiquement est réellement devenu quelque part un personnage du film, ce que vous avez dites tout à fait juste.

Q: Je tiens à vous remercier car vous avez fait plaisir à un fan de One Direction. Je ne sais pas si c’est volontaire de votre part ou non mais je suis en train de revoir les destinations finales en ce moment et j’ai remarqué avec votre film plusieurs points communs. Dans le troisième volet, il y a une sorte de vis ronde sur le toit du métro à un moment et ce métro est sur le quai 180. Votre film montre le quai 181. J’aimerais savoir si c’est un clin d’œil volontaire de votre part ?

Fleischner : pour répondre à la question, par rapport au chiffre 181, la raison pour laquelle on voit ce chiffre c’est tout simplement car c’était un symbolisme par rapport à la forme des chiffres. Je voulais avoir cette impression que le premier un et dernier un correspondent à un tunnel et le huit qui est au milieu représente la boucle de l’infini. Le huit est en référence avec le ruban de Moebius. Le symbolisme est là tout simplement. Par rapport à l saga des Destination Finale, je n’ai vu aucun de ces films et il n’y a donc aucune allusion. Par rapport au groupe One Direction, dans le casting Azul Zorrilla (Carla) est vraiment fan de ce groupe et précisément cette référence a été faite pour elle dans le film. C’est la raison pour laquelle il y a cette référence.

Q: j’en ai plusieurs. La première va dans votre sens du symbolisme que j’aime bien. Vous jouez beaucoup avec les handicaps, c'est-à-dire que vous renvoyez d’autres handicaps à travers le métro, les muets et d’autres. Vous jouez aussi beaucoup avec les miroirs, est-ce une volonté de jouer comme cela, de faire des renvois du reflet du miroir, du reflet de l’handicap.

Fleischner : c’est vrai que ce thème du miroir dont vous parlez est un thème qui est effectivement très important parce que c’est aussi pour moi la manière de dire aux spectateurs qu’il faut arriver aussi à se regarder soi-même car principalement nous sommes tous centrés sur nous-même. On se regarde surtout nous-même et on s’intéresse surtout à nous- même. Plus important encore, bien souvent les personnes les plus égocentriques sont celles qui sont le plus portées vers la critique d’autrui. Quelque part aussi, je voulais que le film s’articule autour de deux thèmes principaux qui sont la destruction et la création qui sont intimement impliquées l’une dans l’autre et très liées finalement. Par exemple ce garçon que l’on voit dans le film est un garçon qui passe d’un chemin d’autodestruction de ce qu’il est et l’entoure, à ce qu’on lui a appris pour finalement pour se réveiller spirituellement au-delà de cette destruction. Quand on parle de destruction bien sûr, je parle de la destruction physique à cause de cette tempête qui tout d’un coup arrive. Cette tempête, on ne l’avait pas prévue et c’est une authentique tempête très dévastatrice qui a frappé New York quelques mois de cela. Cette tempête quand elle est arrivée a détruit tout le voisinage de ma propre maison. Celle-ci a été détruite. J’ai vraiment vécu cela de manière personnelle et très forte. Quelque part c’était une destruction, une vraie catastrophe mais cela a été aussi un challenge, cela m’a vraiment poussé à chercher quelque chose de nouveau dans le film qui a été quelque part apporté par cette tempête. Cela a donné un coup de pouce à la tension dramatique et à l’histoire qu’il y a à l’intérieur. J’ai également pu voir avec plaisir toute la communauté de cet endroit (plage de New York) se souder, se mettre ensemble et cela c’était quelque chose de beau à voir. A la fin du film, j’ai vu qu’il y avait du bon et du mauvais dans tout. Tout est lié.

Q: Ma deuxième question est par rapport à la famille, l’enfant rentre finalement et la famille est recomposée et la tempête est terminée exactement comme dans la famille qui a vécu une espèce de tempête. Est-ce un parallèle que l’on peut faire ou pas.

Fleischner : effectivement cette tempête a complètement une fonction métaphorique dans le film. La vraie tempête, on le comprend en voyant le film, a eu lieu avant que le jeune homme s’en aille car il y avait vraiment un vrai conflit et quelque part effectivement cette tempête (naturelle) est arrivée à point nommée car elle représente effectivement le fait que tout soit balayé et ensuite il y a plein d’espoir donc que cette famille se ressoude de nouveau.

Q: Ma dernière question est de savoir si vous avez adapté la manière de tourner pour coller à votre jeune acteur ?

Fleischner : finalement faire ce film aurait été sans aucun doute difficile avec n’importe quel acteur, qu’il soit autiste ou non car ce n’était pas facile de faire ce film. Il faut savoir que dans la vie de ce jeune acteur, Jesus Sanchez-Velez, de tous les jours, c’est un garçon qui prend quand même le bus deux heures par jour (aller-retour) pour aller et revenir de l’école. Dans le bus en question, le chauffeur est un ancien militaire qui a une discipline de militaire. Il connaissait déjà la discipline et la patience qui sont deux valeurs très appréciables pour un comédien. Si j’avais tourné ce film avec n’importe qui d’autre, finalement je ne sais pas comment cela se serait passé, peut-être qu’il n’y aurait pas eu autant de changements que cela. Le vrai changement, la vraie particularité c’était que pour pouvoir communiquer avec ce jeune comédien, la communication a été différente de ce qu’elle aurait pu être si j’avais communiqué avec d’autres comédiens. Il n’y a pas eu au final tant de différences que cela.

Propos recueillis par Mulder , le 03 septembre 2013.
Avec nos remerciements à toute l’équipe de Le Public System Cinema
Vidéo et photos: Mulder