Head-On

Head-On
Titre original:Head-On
Réalisateur:Fatih Akin
Sortie:Cinéma
Durée:121 minutes
Date:21 juillet 2004
Note:
Cahit, issu de l'immigration turque, mène une vie sans but, marquée par la drogue, l'alcool et les petits boulots minables. Un jour, il conduit sa voiture sans freiner dans un mur. Dans la clinique où il doit se ressaisir de cette tentative de suicide inavouée, il rencontre Sibel, une jeune fille également turque qui aimerait vivre dans la liberté et la recherche du plaisir au lieu de souffrir sous le joug familial. Sibel implore Cahit de l'épouser, pour la forme, afin d'échapper aux pressions de son entourage. De cette relation platonique naîtra une passion amoureuse qui apportera autant de chagrin que de bonheur à ces deux allemands que relie encore beaucoup à la Turquie.

Critique de Tootpadu

Couronné de l'Ours d'or au dernier festival de Berlin, ce drame séduit surtout par sa force brute et son affirmation sans compromis de la vie. Un portrait sans complaisance de la deuxième génération de turcs immigrés en Allemagne, le film montre bien à tel point ces hommes et femmes entre deux cultures peinent à s'assimiler à l'une ou l'autre. Ni la voie de Cahit, qui sombre dans la volonté d'oublier et dans le dédain de ses 'compatriotes' trop attachés aux traditions, ni le choix de Sibel, dont la démarche hédoniste se heurtera rapidement aux dures réalités de la vie, ne présentent une façon de vivre harmonieuse, en paix avec les origines musulmanes et turques et l'environnement matérialiste allemand. Que face à l'adversité et à l'impossibilité de conjugaison satisfaisante le film respire la vie à bras le corps en fait la qualité principale.
Cet optimisme, on le doit avant tout à la fraîcheur des interprétations, le couple de protagonistes en tête. Sibel Kekilli est renversante d'énergie et de beauté, toujours en parfait équilibre sur la corde raide qui sépare les démons sombres de son personnage de la volonté de découvrir la vie dans toute sa diversité. Quant à Birol Ünel, il campe un survivant convaincant qui s'en sort et qui retrouve un peu d'espoir et d'humanité grâce à l'affection de son épouse improbable. Hélas, on ne voit que rarement des êtres humains aussi féroces dans leur colère et dans leur naïveté sur nos écrans !
Enfin, la mise en scène est à l'image du caractère brûlant de son sujet, directe, sans détour, généralement exempte de figures de style inutiles. Seules les interventions des chanteurs trucs, en guise de choeur antique, dénotent un peu dans une structure qui n'en avait pas tellement besoin en termes de délimitation des actes. Pour le reste, Fatih Akin nous présente une tranche de vie vraie qui laisse rêveur en vue d'un traitement semblable de l'immigration par des réalisateurs français. Au lieu de nous présenter toujours les mêmes clichés de racaille - sans même parler de la vague estivale interminable de comédies légèrissimes, à laquelle cette oeuvre sombre sert d'ailleurs comme contre-programmation idéale - le cinéma social français ferait bien de prendre exemple sur ce coup de poing allemand, unanimement acclamé chez lui. Il y a certes eu L'Esquive, mais à part ça, malheureusement rien à signaler de ce côté-ci du Rhin.

Vu le 3 août 2004, à l'UGC Triomphe, Salle 2, en VO

Note de Tootpadu: