Don't Breathe

Don't Breathe
Titre original:Don't Breathe
Réalisateur:Fede Alvarez
Sortie:Cinéma
Durée:88 minutes
Date:05 octobre 2016
Note:

Pour échapper à la violence de sa mère et sauver sa jeune sœur d’une existence sans avenir, Rocky est prête à tout. Avec ses amis Alex et Money, elle a déjà commis quelques cambriolages, mais rien qui leur rapporte assez pour enfin quitter Détroit. Lorsque le trio entend parler d’un aveugle qui vit en solitaire et garde chez lui une petite fortune, ils préparent ce qu’ils pensent être leur ultime coup. Mais leur victime va se révéler bien plus effrayante, et surtout bien plus dangereuse que ce à quoi ils s’attendaient…

Critique de Mulder

Don’t breathe s’impose dès sa découverte comme le thriller horrifique de l’année et surtout consacre Fede Alvarez comme l’un des nouveaux maitres de l’horreur. Pourtant après la relecture intéressante de son précédent film Evil Dead (produit par Ghost House pictures, la société de production fondée par Sam Raimi et Robert Tapert) on aurait pu s’attendre à un nouveau concentré d’horreur ultra violent et gore, mais Don’t Breathe préfère miser astucieusement sur un suspense d’une intensité rare. Une nouvelle fois le réalisateur retrouve son scénariste Rodolfo Sayagues et nous propose un film totalement immersif, un home invasion d’une virtuosité rare.

Le scénario aussi simpliste qu’efficace nous présente trois jeunes adultes qui tirent leurs maigres revenus des nombreux cambriolages qu’ils font pour un gangster et afin d’avoir suffisamment d’argent pour partir s’installer à Los Angeles. Pourtant en voulant voler un ancien militaire aveugle, ils vont se retrouver face à un individu qu’ils avaient totalement sous-estimé. Le concept du home invasion a souvent pour finalité de présenter une famille dans une vaste maison et qui se retrouve menacée par des dangereux malfaiteurs prêts à tout pour arriver à leur fin. Dans le cas présent, les trois jeunes adultes font des cambriolages uniquement pour pouvoir survire dans une ville sinistrée et dans laquelle il est devenu difficile de réussir sa vie. Le propriétaire de cette maison dans laquelle se situe la grande majorité du film est un ancien vétéran militaire qui vit dans un quartier abandonné de Détroit. Sa maison est construite comme un véritable piège pour tous ceux qui osent y pénétrer. Le réalisateur a totalement voulu éviter les pièges de la surenchère face à son premier film jugé trop violent et trop saignant. Il revient donc à l’essence même de thriller en huis clos et s’appuie sur une réalisation parfaitement fluide et surtout sur de nombreux effets sonores et musicaux afin de créer une ambiance inquiétante et envoûtante.

Le réalisateur retrouve ainsi non seulement son scénariste mais aussi son actrice principale de son précédent film, Jane Levy, les mêmes producteurs et surtout le même compositeur Roque Baños. Il en ressort un équilibre indéniable entre une mise en scène élaborée avec soin et une musique en phase et renforçant subtilement le climat. Face à ces trois jeunes comédiens, il fallait trouver un comédien capable d’incarner cet aveugle violent et à la limite de la folie. C’est Stephen Lang (La manière forte (1991), Avatar (2009), Conan (2011)..) au physique impressionnant qui est retenu pour le rôle le plus important du film. Loin des nombreux seconds rôles qui ont jalonné sa longue carrière, ce film lui permet de révéler une plus grande étendue de son talent. Un grand soin a été également apporté à de nombreux plans aériens afin de mieux créer cet aspect de quartier abandonné sans réelle âme vivante. De la même manière, le film se passant pratiquement en temps réel et de nuit, il fallait pourvoir maîtrisé un éclairage restreint et révéler une atmosphère étrange. Le réalisateur a pu s’appuyer sur son chef-opérateur afin de créer un climat violent et asphyxiant.

Le film sait parfaitement jouer avec les nerfs des spectateurs et surtout maximiser les nombreux effets afin de faire réellement peur et réveiller leurs craintes les plus profondes. Rares sont les seconds films aussi réussis et surtout témoignant d’une volonté du réalisateur d’éviter d’aller vers la facilité. Alors que l’on pouvait s’attendre à un nouveau home invasion traditionnel, le réalisateur juxtapose intelligemment une sous intrigue aussi passionnante que celle se déroulant devant nos yeux et surtout dynamise la sacro sainte famille. Ce cocon de la maison plutôt symbole de protection devient ici une véritable zone de guerre dans laquelle tous les recoins sont d’hypothétiques zones dangereuses. En plantant son décor à Détroit dans une ville dans laquelle le chômage est omniprésent, certains quartiers totalement laissés à l’abandon, le réalisateur livre un portrait guère élogieux d’une Amérique sur son déclin. Les anciens héros de guerre sont devenus de véritables barbares pratiquant la loi du talion. Ce constant aussi intéressant qu’inquiétant renforce l’idée que Don’t Breathe est plus qu’un simple thriller horrifique c’est surtout une expérience cinématographique forte, envoûtante et d’une précision hitchcockienne vouée à devenir un modèle du genre instantanément.

Vu le 26 septembre 2016 au Studio 28, en VO

Note de Mulder: