Titre original: | Selma |
Réalisateur: | Ava DuVernay |
Sortie: | Cinéma |
Durée: | 122 minutes |
Date: | 11 mars 2015 |
Note: | |
Selma retrace la lutte historique du Dr Martin Luther King pour garantir le droit de vote à tous les citoyens. Une dangereuse et terrifiante campagne qui s’est achevée par une longue marche, depuis la ville de Selma jusqu’à celle de Montgomery, en Alabama, et qui a conduit le président Jonhson à signer la loi sur le droit de vote en 1965.
Critique de Balrog
Ava DuVernay signe un premier long métrage en 2008 avec "This is the life", un documentaire musical sur la culture hip-hop. Son second film "I will follow" (2010) est récompensé par le prix du meilleur scénario au African-American Film Critics Association 2011. Son troisième long métrage "Middle of nowhere" (2012) est encensé par la critique et reçoit quatre récompenses dont le prix du meilleur réalisateur au Festival du film Sundance 2012. Réaliser un film sur Martin Luther King est estimable tant les évènements historiques associés au personnage représentent une source inépuisable d'inspirations et de connaissances. D'autant que "Selma" est le premier et unique film à ce jour qui relate le combat de Martin Luther King pour la défense des droits civiques.
Ava DuVernay dénote une appartenance affirmée au cinéma indépendant et engagé. Au regard de sa filmographie, on constate une volonté de dépeindre différents points d'ancrage de la culture afro-américaine. Avec "Selma", Ava DuVernay exerce son talent de cinéaste avec maturité et ce film témoigne d'un travail pesé et soutenu par cinquante années de réflexion. "Selma" raconte la lutte du Dr Martin Luther King pour garantir le droit de vote à tous les citoyens de la communauté noire américaine. Commence une série d'actes violents causés par les opposants à l'égalité des droits. Cette campagne ensanglantée s'achève par une longue marche, depuis la ville de Selma jusqu'à Montgomery en Alabama, après quoi, le président Lyndon B. Johnson signera la loi sur le droit de vote en 1965.
Concernant la mise en scène, la réalisatrice Ava DuVernay joue sur différents tableaux. Le spectateur assiste à une lutte politique menée dans les coulisses du pouvoir, aux oppositions violentes à l'égard des citoyens afro-américains et aux dilemmes personnels de Martin Luther King. C'est un choix intéressant et légitime de montrer cet épisode tragique sous tous les angles pour mieux comprendre l'état d'urgence. Mais, s'étendre sur différents plans requiert une adresse scénaristique incroyable. Le récit perd parfois en régularité et les deux heures ne suffisent pas au film pour former un ensemble imperfectible. Il y a beaucoup d'éléments et le récit passe facilement d'une information à une autre. Cependant, Ava DuVernay revendique une vision réelle et pose un regard sans compromis sur un sujet aussi délicat. "Selma" est emprunt d'une force émotionnelle implacable qui extirpe un sentiment extrêmement fort d'une empathie totalement justifiée au regard d'une animosité gratuite. Le film n'a pas de commencement ni de fin. La scène d'introduction marque durement le ton du film et la scène finale symbolise l'espoir d'un futur meilleur, comme pour signifier l'intemporalité des évènements.
Si il est une règle essentielle dans un biopic pour restituer la vérité, c'est de présenter les personnages dans leur entièreté. Ava DuVernay l'a bien compris et raconte cette histoire en respectant le caractère propre de chaque personnage. La réalisatrice confie le rôle de Martin Luther King à l'acteur David Oyelowo avec qui elle a déjà collaboré sur le tournage de "Middle of Nowhere". Avec quinze ans d'expérience cinématographique L'acteur apporte une sensibilité et un charisme exemplaires pour interpréter le rôle du Dr King. L'acteur restitue avec justesse un personnage qui, au-delà du courage, se montre aussi singulier que ses pairs. Ava DuVernay présente un personnage solide et fragile à la fois. Sur ce point, la réalisatrice ne manque pas d'exposer ses personnages sous une vraie nature et d'illustrer une dimension plus humaine. Notons la présence de Oprah Winfrey, Tim Roth ou encore Tom Wilkinson parmi d'autres acteurs de talents. Ils apportent une valeur sûre au film et incarnent avec conviction leur personnage.
"Selma" est un biopic réaliste dont l'histoire rend compte de la nature complexe des évènements avec rigueur. Un jeu d'acteur finement mesuré et une représentation franche cimentent l'authenticité du récit. Raconter cet épisode historique aussi dense et étendu soit il, en si peu de temps, ajoute une déplaisante perspective. Néanmoins, Ava DuVernay réussit un audacieux tour de force et témoigne de sa ferveur et d'une implication digne d'intérêt.
Vu le mardi 27 janvier à la salle Pathé en VO
Note de Balrog:
Critique de Mulder
“Early morning, April four
Shot rings out in the Memphis sky.
Free at last, they took your life
They could not take your pride.”
U2 - Pride
« Tant qu’un homme n’a pas découvert quelque chose pour lequel il serait prêt à mourir, il n’est pas à même de vivre. » - Martin Luther King Extrait d'un discours à Detroit - 23 Juin 1963
Le cinéma ne devrait pas se contenter d’être un média culturel pour se divertir, il devrait également nous apporter une certaine réflexion sur notre passé pour mieux construire notre avenir. Dans ce sens, le troisième film d’Ava Marie DuVernay (après deux films I will follow (2010) et Middle of Nowhere) est une des excellentes surprises de ce début d’année. De nombreux réalisateurs ont été intéressés par le projet relatif à ce film notamment Lee Daniels, Spike Lee et Steven Spielberg. Il aura ainsi fallu attendre cinquante ans afin de voir enfin un film sur le printemps 1965 et sur cette marche, fondatrice des droits des afro-américains, de Selma à Montgomery.
Après avoir obtenu le prix Nobel de la paix en 1964 pour sa lutte non-violente contre la ségrégation raciale, Martin Luther King s’engage fermement pour que le droit de vote soit ouvert également aux afro-américains. Sa campagne fut longue et difficile mais permit la signature de la loi sur le droit de vote en 1965 par le Président des Etats- Unis Lyndon Baines Johnson. Le scénario signé par Paul Webb se devait d’être mis en scène par un réalisateur défendant la même cause. La réussite de ce film tient ainsi majoritairement à une réalisatrice en phase avec son sujet et une direction d’acteurs magistrale. Dans ce sens, le casting parfaitement sélectionné repose sur des interprétations très convaincantes. David Oyelowo se révèle très convaincant dans le rôle de Martin Luther King Jr., très humaniste et très bon orateur, ses différentes joutes verbales font de ce film l’un des événements cinématographiques de cette année. De la même manière le casting des seconds rôles permet de retrouver Tom Wilkinson (Président Lyndon B. Johnson), Carmen Ejogo (Coretta Scott King), Giovanni Ribisi (Lee C. White), Oprah Winfrey (Annie Lee Cooper) et Tim Roth (George Wallace).
L’engagement de la réalisatrice Ava DuVernay envers son sujet se ressent à chaque scène. Elle dresse ainsi un portrait de la société américaine des années 60 peu flatteur dans laquelle les afro-américains ne sont toujours pas bien assimilés. On peut ainsi considérer ce film par son aspect historique mais également politique. Le grand soin apporté au scénario donne au film un aspect universel. Celui-ci s’est également retrouvé au cœur d’un polémique pour le peu de nominations obtenues cette année aux Oscar.
Enfin, la mise en scène très statique par moment notamment lors des scènes en espace limité renforce la force des différentes scènes de marches présentes dans le film. Ce choix plutôt risqué donne au film une certaine aura expliquant aisément sa sélection dans la catégorie meilleur film aux Oscar. On ne peut donc que vous conseiller de découvrir ce film majestueux qui nous aide à mieux appréhender notre vision du monde actuel. Celui-ci s'impose donc tout simplemet comme l'un des films majeurs de 2015 par sa sobriété et sa sincérité de rendre hommage à Martin Luther King.
Vu le 19 février 2015, à la Salle Pathé Lamennais
Note de Mulder: