Esquive (L')

Esquive (L')
Titre original:Esquive (L')
Réalisateur:Abdellatif Kechiche
Sortie:Cinéma
Durée:124 minutes
Date:07 janvier 2004
Note:
Abdelkrim, dit 'Krimo', un jeune de la cité a rompu la relation de longue date avec sa copine, Magalie. Il tombe alors amoureux de Lydia, une copine de classe qui joue dans une pièce de Marivaux. Pour se rapprocher d'elle, il prend aussi un rôle dans le spectacle du lycée. Mais Lydia le laisse dans le doute, face aux pressions qu'elle subit de la part de Magalie et des copains de Krimo.

Critique de Tootpadu

Même s'il n'en a pas l'air à première vue, ce deuxième long-métrage d'Abdellatif Kechiche est une observation subtile et pertinente de la violence en milieu urbain. Bien qu'il s'agisse la plupart du temps de violence verbale, il règne tout au long du film une certaine tension qui trouve son apogée justement lorsque les jeunes sont confrontés aux détenteurs du pouvoir, c'est-à-dire la police. Que cette séquence-là soit plus inquiétante que toutes les disputes d'avant montre bien à quel point, selon le film, le milieu des jeunes fonctionne raisonnablement tant qu'ils sont entre eux. Car le rôle des adultes est limité à des entités absentes (le père en prison) ou des accompagnateurs distants (la mère, la prof).
Place alors aux jeunes qui tchatchent sans arrêt, parfois sans rien dire (cf. la première séquence), qui s'insultent et qui se menacent, qui font leur petit marché afin d'arriver à leurs fins. Dans ce monde, dominé par la parole rapide et forte, le protagoniste Krimo dénote d'ailleurs en ce qu'il n'est pas un maître de l'expression, mais plutôt maladroit dans son approche de Lydia, indirectement dépendant de l'intervention des autres pour faire avancer cette histoire. Qu'il n'arrive pas à mener son projet à bien et que l'aide du copain a finalement l'effet inverse, voilà le drame d'un personnage introverti à qui la fin du film n'offre pas de solution facile.
A la façon du langage des banlieusards avec leur verlan, leurs expressions à la fois vulgaires et d'origine religieuse, débitées à tout va, la mise en scène a choisi une approche directe, écorchée de son sujet qui privilégie les gros plans ou, à l'opposé, de longues affrontements verbaux à l'air improvisé. Ne jugeant jamais ces jeunes, et sans apitoiement non plus, Kechiche a créé un film de banlieue sournoisement engagé et indubitablement revigorant.

Vu le 10 février 2004, à l'UGC Ciné Cité Bercy, Salle 22

Note de Tootpadu: