Way La Route ensemble (The)

Nous avions fait le Chemin de Compostelle au milieu des années 1990. Nous avions certes effectué que la moitié du chemin parcouru à pied par les personnages du film et nous étions entourés d’un groupe, ce qui a rendu l’aventure sensiblement moins individualiste, mais dans l’ensemble, nous pouvons nous enorgueillir de savoir de première main à quoi ressemble cette longue randonnée spirituelle à travers l’Espagne du nord. Il faut alors reconnaître que ce film – déjà le quatrième en tant que réalisateur de Emilio Estevez – en retranscrit fidèlement certains points fondamentaux : la sensation de devenir de plus en plus un nomade, au point de ne plus vouloir retourner à notre existence sédentaire ; l’encadrement spirituel très libre qui permet à chacun de tirer ses propres conclusions de ce voyage initiatique ; la beauté du chemin avec son environnement naturel et culturel, partagée avec d’autres pèlerins venus d’horizons très divers.

Après, l’agencement de l’histoire touchante du père qui entreprend le pèlerinage en quelque sorte par procuration pour son fils disparu nous a déjà moins enthousiasmé. Le récit de The Way La Route ensemble ne pèche point par une éventuelle abondance de bons sentiments, ni même par un ton trop solennel. C’est plutôt l’évolution très limitée des personnages au fur et à mesure qu’ils approchent de la destination en fin de compte provisoire qui le laisse stagner au niveau d’une superficialité folklorique, sans doute pas assez recherchée pour une toile de fond d’une telle envergure.

Et puis, les deux lacunes majeures de la mise en scène sont l’emploi omniprésent de la musique, comme si l’un des éléments constituants du Chemin n’étaient pas ces moments de silence, qui permettent au voyageur de méditer tranquillement d’une manière ou d’une autre. Ainsi que l’empressement de faire apparaître le défunt, interprété en plus par le réalisateur lui-même, à tout bout de champs, alors que sa mémoire est d’ores et déjà célébrée à intervalles réguliers par les petites pauses commémoratives, et plus généralement par le deuil que le protagoniste porte en lui à chaque instant de ce beau voyage.

Vu le 26 août 2013, au Club Marbeuf, en VO

Note de Tootpadu: